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Grey Tickles Black Pressure, John Grant

Grey Tickles Black Pressure, John Grant

John Grant Grey tickles and black pressure Style : Pop baroque et cyclothymique Sortie : 02/10/2015

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Quand Queen of Denmark de John Grant est paru dans une confidentialité redoutable, on avait reçu ce mail étonnant de la part de l'un de nos amis anglais, du Brighton Magazine, "Je ne comprends pas, je suis le seul à adorer ce disque au bureau. Help." On avait découvert une splendeur sombre et éteinte, la lueur désespérée et mate du disque de la dernière chance, réalisé avec l'aide de Midlake. Et de filer à Bruxelles voir John Grant en concert, formation minimaliste et set tout en retenue, à deux claviers. Éblouissant, sans la moindre facilité.

On avait finalement adoré cet album, porteur de toutes les douleurs de Grant. Le disque devenait ainsi très dangereux... ce qui l'avait nourri, une vraie dépression et des années d'addictions diverses n'étant plus d'actualité, le following pouvait s'avérer décevant. Deux albums plus tard, John Grant rassure tout le monde. Après un second album solo très électronique et un album un peu grandiloquent avec orchestre symphonique, il respecte un principe très sain en matière de création : il change de direction, il est parfois difficile à suivre et c'est un compliment. Comme le dit Kim Giani, artiste hyper productif bordelais c'est la moindre des choses, pour un artiste, d'être difficile à suivre. Ça devrait. 

Cet album, chatouilles grises (la mid life crisis en Islandais, traduit littéralement) et cauchemars (traduction littérale du Turc), est d'une diversité baroque et atomisée. John Grant s'est absolument tout permis et il a une nouvelle fois l'élégance de proposer une direction inédite, presque gaie, presque funk, presque dance, presque tout ça. Un disque puissant, servi par des qualités vocales hors normes et une façon toute spéciale de faire monter la mélodie chantée en neige immaculée. On retrouve le John Grant des deux premiers albums studio et ce John Grant inédit, celui qui vous fait taper du pied ou imiter des poses discos en attendant que le feu passe au vert, au son de stompers de dance floor, ou presque.

Totalement assumé, John Grant se lâche. A fond. Pioche dans tout son imaginaire,  commence et termine même par des versets de la bible, c'est dire. Des mélodies posées et sublimes côtoient des envolées synthétiques électroniques parfois volontairement cheap, à la manière de groupes qu'il cite volontiers: Eurythmics, Devo, Yazoo, Kraftwerk, et... Jean-Michel Jarre. Cet éclatement donnera le tournis à certains, on ne serait pas non plus surpris que le disque subisse assez vite une programmation sélective rigoureuse, des petits coups de doigt nerveux sur l'avance rapide autant que sur la touche repeat. La double crème en chantilly sucrée aux synthés peut agacer mais il y a dans l'ensemble une santé, une envie, une pulsion remarquable, un je-ne-sais-quoi d'outrageusement vivant et revendiqué comme tel : ce que je suis, tout ce que je suis, dans toutes les dimensions. C'en est convaincant, surtout que ne manque jamais, ni dans la musique, ni dans les textes, une très salutaire distance acerbe et drôle, une ironie mordante et piquante. Le Grant ne fait ni dans le docile, ni dans le facile, rétif et tout en panache. Take it or leave it, pas de négociations prévues. 

En concert au Botanique à Bruxelles le 17 novembre.

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