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« Ones and Sixes » par Low

« Ones and Sixes » par Low

Low Ones and Sixes Style : Slowcore Sortie : 11/09/2015

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On est sur le bord du disque de Low comme au seuil d'une immense étendue de givre et de glace, de sable et de pierre, une steppe sobre et belle, qu'on ne peut regarder que la main en visière et en cillant. Comme on regarde une aube grise, incertaine, pleine des promesses retenues d'un jour nouveau. Aucune ampleur injustifiée, aucune emphase, une angoisse poignante en moteur interne pour faire avancer les titres. Une splendeur aveuglante, lente, évidemment, en mode slowcore. C'est sans doute le tour de force le plus impressionnant du travail du trio : nous tenir, totalement, d'un bout à l'autre, sans élever une seule fois le ton, avec une sobriété qui fera passer sans problèmes le sens et le poids du disque, que l'on comprenne les paroles ou pas. Un disque terriblement humain, qui nous ressemble tous, aux hasards des méandres de nos vies. Une touche américaine dans le ressenti sans doute mais une dimension universelle indéniable, comme tous les grands disques. Poignant et angoissant parfois, aussi, comme le Closer de Joy Division.

Tempos lents en étendard, claviers en contrepoints harmoniques d'un beat martial et robotique, on avance dès le premier morceau comme dans une nuit de somnambule, les voix de Mimi Parker et d'Alan s'entrelacent en rempart ultime contre ce dehors que Sparhawk déteste, le monde tel qu'il est, le monde d'un américain d'aujourd'hui. L'inquiétude devient beauté permanente et guide l'auditeur, soudainement arrêté, comme on peut l'être devant une grande photo qui s'oppose au flux fugace d'images qui nous assomme. La lenteur oblige l'écoute. Les minces accords déclinés, tout juste enregistrés au micro sans artifice scintillent de simplicité. La tension ne naît jamais d'une quelconque accélération ou d'un volume soudainement poussé sans raison, c'est justement cette immobilité apparente qui nous scotche jusqu'à l'implosion attendue, dans Spanish Translation par exemple. C'est littéralement tremblant d'humanité. Gentle, middle, quiet, narrow / Careful, measure /Tortured, stable / It doesn’t have to end this way / But this is where we stand. Tout est clair dès le premier titre. Ce disque vous étreint totalement, vous enlace en tremblant et vous ne pouvez pas le repousser. Les harmonies sont splendides, le début de No End par exemple et sa voix qui semble descendre une gamme de cristal avant que les chœurs ne viennent la supporter brillamment. On arpente les chemins verglacés et les vents coupants de cet album mystique et spectral, traversé d'éclairs blancs qui refusent obstinément de prendre la couleur du feu. Splendide.

En concert au Grand Mix, le 30 octobre.

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