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« Trois Jours et une Vie » : Nicolas Boukhrief adapte le polar de Pierre Lemaitre, auteur de « Au Revoir Là-Haut »

L’Actu Ciné de Lille La Nuit se penche sur Trois Jours et une Vie de Nicolas Boukhrief. Cette adaptation du roman de Pierre Lemaitre (Prix Goncourt pour Au Revoir Là-Haut), nous plonge au cœur des Ardennes belges, à la fin des années 90, au moment où un enfant disparaît. Trois Jours et une Vie : voilà du beau cinéma d’artisan, soutenu par une distribution éclatante.

Un jour, la vie d'Antoine Courtin (Jeremy Senez : une révélation) va basculer.

Le cinéaste Nicolas Boukhrief

Nicolas Boukhrief fut d'abord critique de cinéma et cocréateur avec Christophe Gans - futur réalisateur de Le Pacte des Loups - et quelques autres de la légendaire revue de cinéma Starfix, adulée par toute une génération de cinéphiles (de 1983 à 1990, date de la fin de sa parution).

Puis Boukhrief est passé à l’écriture et à la réalisation avec des films comme Le Convoyeur (2003), Cortex (2008), Gardiens de l’Ordre (2009), Made in France (2016).

S’il s’est échappé du cinéma de genre avec l’adaptation en 2015 du roman de Béatrix Beck, La Confession (déjà porté à l’écran par Melville sous le titre de Léon Morin, Prêtre, avec Jean-Paul Belmondo et Emmanuelle Riva), Boukhrief a souvent tourné des polars.

Trois Jours et une Vie est-il un polar ? D’une certaine façon. Plus encore s’agit-il d’un film noir, puisqu’au cœur de cette histoire, se trouve la disparition d’un petit garçon. Mais ce film peut tout aussi bien être vu comme un drame provincial (comme les affectionnait Chabrol), une fable ou un conte sombre (le récit débute à la période de Noël). Ou, encore, la radiographie de la communauté d’un village.

Pierre Lemaitre adapte son roman

Pierre Lemaitre se penche de nouveau sur l’adaptation de l’un de ses romans - il gagna le César de la meilleur adaptation pour Au Revoir Là-Haut, réalisé par Albert Dupontel -. Véritable best-seller (plus de 300.00 exemplaires vendus !), Trois Jours et une Vie est pourtant une œuvre au noir. La transposition cinématographique n’édulcore pas le propos. Durant deux heures, il sera question de secrets et mystères, quête d’identité, destins, du poids de la culpabilité… Tout ce qui fait la force des tragédies antiques. Autant de thèmes qui furent repris par les grands réalisateurs de films noirs américains (la plupart du temps des immigrés, tel l’immense Fritz Lang) sous influence du cinéma expressionniste allemand.

L'écrivain et scénariste Pierre Lemaitre apparait dans Trois Jours et une Vie.

Nicolas Boukhrief ne trahit pas le roman, mais il n’oublie pas de s’approprier le matériau de départ que constitue le scénario.

Des interprètes de premier ordre

Comme le script, la mise en scène est au cordeau. Et la mise en scène commence d’abord par le choix des comédiens. On notera la qualité de la distribution de Trois Jours et une Vie. Au point qu’on imagine mal cette histoire (se déroulant sur deux décennies) interprétée par d’autres comédiens. Sandrine Bonnaire, Philippe Torreton, Charles Berling, Margot Bancilhon, apportent toute l’implication et la vérité que nécessite l’interprétation de leurs personnages. Ils ne surjouent pas. On peut même dire qu'ils « soustraient » pour donner vie au trouble et à l’opacité que demande une telle histoire. Soulignons au passage les performances du jeune Jeremy Senez et de Pablo pauly (Patients) chargés d’interpréter le même personnage, Antoine Courtin, à deux âges distincts.

Après Patients, Pablo Pauly impressionne dans la peau d'Antoine Courtin, adulte.

Un retour aux sources

Le film est faussement simple. Il fait intervenir de nombreux personnages. C'est une œuvre chorale dans laquelle chaque protagoniste tient une place capitale (les seconds rôles sont importants). En faisant preuve d’une rigueur absolue (Boukhrief apporte le même soin à ses décors, cadres, montage qu'au choix de ses acteurs), le réalisateur redonne vie à un cinéma qui fut souvent critiqué, honni, balayé par certains jeunes turcs de la Nouvelle Vague. Quand on regarde Trois Jours et une Vie, on pense au travail des grands scénaristes Bost et Aurenche (La Traversée de Paris, Le Juge et l'Assassin), à de remarquables cinéastes de films noirs tels Pierre Chenal (il faut voir Le Dernier Tournant ou L'Alibi) ou Henri-Georges Clouzot (Trois Jours et une Vie évoque Le Corbeau). On songe également à Chabrol.

Pour autant, Boukhrief prouve qu’il est un cinéphile sachant digérer ses influences, les transformer en obsessions personnelles. Et les traiter d'une façon très contemporaine.

Sandrine Bonnaire, l'une de nos plus grandes actrices, incarne Blanche Courtin.

Certains verront peut-être (et à tort !) de l’académisme dans Trois Jours et une Vie. En assumant son beau classicisme et sa rigueur, en se plaçant à l’opposé de ce que produit actuellement la majorité du cinéma français, Nicolas Boukhrief réalise, au contraire, une œuvre profondément anti-académique. Et en profite pour signer son plus beau film.

Les infos sur Trois Jours et une Vie

Synopsis : 1999 - Olloy - Les Ardennes belges. Un enfant vient de disparaitre. La suspicion qui touche tour à tour plusieurs villageois porte rapidement la communauté à incandescence. Mais un événement inattendu et dévastateur va soudain venir redistribuer les cartes du destin.

Trois Jours et une Vie de Nicolas Boukhrief
Scénario de Pierre Lemaitre et Perrine Margaine
D’après l’œuvre de Pierre Lemaitre
Avec Sandrine Bonnaire, Pablo Pauly, Philippe Torreton, Charles Berling, Margot Bancilhon, Jeremy Senez…
Musique :  Rob

Durée : 1h59
Sortie salles le 18 septembre 2019

Affiche, photos et film-annonce Gaumont

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