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TaxiWars

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TaxiWars TaxiWars Style : Be Bop Belge Sortie : 26/02/2016

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Pour tous les puristes accros aux étiquettes savantes (Post-néo bop ? Before-punk free jazz ?) qui permettent de ranger sagement une discothèque par style, voilà un magnifique échantillon de poil à gratter critique. Ils vont passer des heures à décaler leurs albums de dEUS et à recaler leurs albums de Pharaoh Sanders en se demandant ou ranger ce TaxiWars. Bref, du rififi dans les étagères, le bordel dans l'alphabétique, du grabuge dans les classeurs. Que Tom Barman compile trois disques pour Universal Belgique remplis du jazz de John Coltrane, Sun Ra, Archie Shepp ou Max Roach passe encore, mais là, hurlements de loup-garou assurés, à quoi joue le chanteur de dEUS ?

Peut être tout simplement à casser des schémas, à sortir des ornières, à trouver de nouveaux chemins... qu'il trouve, brillamment, au sein d'une meute de jazzmen authentiques embarqués dans son feeling. Sans jouer les puristes, justement, on évitera soigneusement le terme Jazzy, cette petite coloration sympathiquement inoffensive qu'on a beaucoup décliné dans les années 80 à coups de saxophone ténor chocolaté pour enceintes pâtissières rondes en basses. Non. C'est du jazz, en format court, comme il l'a dit lui-même. L'économie générale de la chanson pour la durée, le son du jazz pour les tessitures et les déclinaisons sonores.

On retrouve l'énergie vibratile du leader de dEUS dans le chant, dans cette urgence qu'il a toujours l'air de porter, comme si la minute d'après était déjà pré-chargée dans l'attente d'être délivrée sous pli express. Il s'autorise quelques touches filtrées, du vocoder au bégaiement synthétique orchestré, soutenue d'une basse urgente, toujours en mouvement, et de cymbales chuintant dans un soleil imaginaire, à contre jour. Barman n'est pas allé s'aventurer du côté des grands du spoken word comme Anthony Joseph ou Gil-Scott Heron, peu accessibles en partant de son registre vocal. Il a eu l'extrême intelligence de ne pas chiquer au vocaliste technicien qu'il n'est pas, il est resté lui même en jouant des formats et des intonations.

Une esthétique magnifique qui combine à la fois l'expressivité du jazz et la concision du format pop tout en ne jouant d'aucun compromis. On est un peu comme chez les cousins des Bad Plus, de GoGo Penguin du Neil Cowley Trio.  La sonorité du ténor de Robin Verheyen est absolument splendide, la anche vibre sous ses assauts répétés et délivre toutes ses sonorités, d'une richesse à couper le souffle, maniant la tension avec une rare agilité, sachant abandonner l'espace pour venir le reconquérir, en vrai jazzman concertant, qui fait de la place à ses comparses, les excellents Nicolas Thys et Antoine Pierre, bassiste et batteur d'un talent fou. Voilà un disque très étonnant puisqu'il nous a donné, vraiment, envie de le réécouter par sections: la contrebasse, le saxophone, le chant, la batterie. Rare. Tout est clair à chaque étage. Urbain, tendu et définitivement jazz, vibrant comme les deux z du mot. Franchement, c'est stupéfiant et ça devrait l'être sur la scène de l'Aéronef, le 25 octobre.

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