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« Mon Légionnaire » : Louis Garrel et Camille Cottin dans un drame intimiste et spectaculaire

Pour son Actu Ciné, LillelaNuit a retenu Mon Légionnaire. Le film de Rachel Lang nous fait découvrir la Légion de l’intérieur, mais, aussi, le quotidien des femmes de soldats, qui attendent le retour, souvent dans l’angoisse, de leurs compagnons. Loin des clichés, brillamment interprété par Louis Garrel, Camille Cottin, la regrettée Ina Marija Bartaité, Aleksandr Kuznetsov, Mon Légionnaire a la véracité que n’ont pas toujours les films sur ce sujet. La raison : Rachel Lang fut militaire.

Rachel Lang, cinéaste et... militaire

Remarquée pour son premier film Baden Baden (2016), Rachel Lang change de registre avec Mon Légionnaire. Dans un monde encore trop normé et binaire, certains s’étonneront qu’une femme consacre un film à l’armée. Ils ne devraient pas. En premier lieu, car ce n’est pas une première. Claire Denis a réalisé Beau Travail (1999), un film superbe sur la Légion, Susanne Bier a mis en scène l'impeccable Brothers (2004), Kathryn Bigelow a signé Démineurs (2009 - Oscars du meilleur film et de la meilleur réalisatrice). On pourrait trouver d’autres exemples.

Camille Cottin se crée une place internationale au cinéma.

Si Rachel Lang signe un film sur la Légion, c’est qu’elle connaît bien l’armée : à 19 ans, pour se payer un billet d’avion pour le Brésil, elle répond à une annonce de recrutement proposant une formation initiale de soldat de réserve. Durant deux semaines, elle découvre un tout autre univers que le sien. Elle devient réserviste pendant deux ans, quitte l’armée le temps de sa formation à l’IAD (école d'arts du spectacle) en Belgique. À l’issue de ses études, elle se réengage et se forme pour être officier. Elle gère pendant plusieurs années, au quotidien, 40 soldats de réserve affectés à différentes missions. Quel parcours ! Autant dire que Rachel Lang a toute légitimité, s’il faut en avoir, pour traiter son sujet. Pour Mon Légionnaire, Rachel Lang fait le choix de la Légion car on n’y trouve pas de mixité. La Légion n’est constitué que d’hommes venus de tous horizons et nationalités (152 au total). Avec ce milieu extrême, Rachel Lang tenait le sujet de son prochain film. Il aura fallu réduire le scénario, trop ambitieux et cher, faire sans l’aide de l’armée française (la Légion voit d’un mauvais œil qu’une femme lui consacre un film). Rachel Lang tient. A l’arrivée, elle signe un « war drama » passionnant. Si les Américains sont coutumiers du fait, le cinéma français actuel (assez hostile à l’armée) ne s’y intéresse qu’à de trop rares occasions.

Mon Légionnaire : le dernier film de la talentueuse et regrettée Ina Marija Bartaité.

Un superbe quatuor de comédiens

Dans le rôle de Maxime, la prestation de Louis Garrel impressionne. Quand on lui propose le rôle, Rachel Lang tique. Elle ne veut d’abord pas rencontrer qu’elle juge par trop germanopratin. Quand elle revient sur sa décision, Garrel suit un entrainement sportif et militaire intensif de six mois. Dès les premières secondes du film, on sait le pari gagné, tant Louis Garrel impose une autorité naturelle. Les autres comédiens sont au diapason. Camille Cottin, dans le rôle de Céline, la compagne de Maxime, confirme qu’elle une comédienne sur qui l’on doit compter (on peut la voir actuellement dans Stillwater avec Matt Damon, bientôt dans House of Gucci de Ridley Scott). L’autre couple au cœur du film est interprété par l’excellent Aleksandr Kuznetsov (dans le rôle de Vlad), et Ina Marija Bartaité. On a eu un gros coup de cœur pour cette jeune femme (fille du réalisateur Sharunas Bartas et de l’actrice Katarina Golubeva) si touchante, vibrante, entière, dans la peau de Nika (Mon Légionnaire, fut, hélas, le dernier rôle de la jeune comédienne, disparue tragiquement dans un accident de la circulation, à l’âge de 25 ans). Avec ce choix de distribution, Rachel Lang tient la bonne "matière vivante" pour filmer des couples crédibles.

Louis Garrel, impeccable dans un rôle qu'on ne l'imaginait pas incarner.

Un film intimiste et spectaculaire

Rachel Lang filme en parallèle les vies de ces femmes, et de « leurs » légionnaires. Mon Légionnaire prend alors la forme d’un film choral. Le genre est difficile à maîtriser, tant il demande un équilibre parfait. Par la grâce d’une écriture précise, d’une mise en scène au cordeau, on croît aux moments d’attente, de retrouvailles, aux angoisses des femmes, aux peurs des hommes sur le terrain, au Mali. Le mystère qui entoure depuis toujours les légionnaires est bien traité. Qui sont ces hommes ? D'où viennent-ils ? Quel est leur passé ? Veulent-ils se faire oublier ? Rachel Lang joue intelligemment avec la légende et la mythologie. Son travail sur le hors-champ est remarquable. Ainsi, elle laisse une part d'imaginaire au spectateur. L’aspect psychologique est aussi bien traité que les moments d’action, lorsque les soldats sont sur le terrain, en opérations, ou aux combats. Si Rachel Lang sait diriger des comédiens, elle se montre tout aussi crédible dans la réalisation de séquences d’action. L’une des seules véritables scène de guerre, très préparée en amont par l'équipe technique, fut filmée en seulement six heures. Le résultat est bluffant.

Impressionnant tout autant qu’intimiste, Mon Légionnaire est un film singulier dans le cinéma français. Le travail de Rachel Lang est à suivre. Elle ne semble pas faire partie de ces cinéastes dont le chemin paraît déjà tracé et balisé.

Les infos sur Mon Légionnaire

Synopsis : Ils viennent de partout, ils ont désormais une chose en commun : la Légion Étrangère, leur nouvelle famille. Mon Légionnaire raconte leurs histoires : celle de ces femmes qui luttent pour garder leur amour bien vivant, celle de ces hommes qui se battent pour la France, celle de ces couples qui se construisent en territoire hostile.

Mon Légionnaire de Rachel Lang
avec Louis Garrel, Camille Cottin, Ina Marija Bartaité, Aleksandr Kuznetsov
Producteurs : Jérémy Forni, Benoît Roland

Sortie le 06 octobre 2021
Durée : 107 minutes

Cannes 2021 - Film de clôture de la Quinzaine des Réalisateurs
Q & A à Cannes

Visuels : Bac Films

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