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« Argo »: le dernier Ben Affleck

C’est à un véritable voyage au cœur de l’histoire, la politique et d’un certain cinéma qui fleure bon l’Amérique des seventies que nous convie cette semaine, l’acteur-réalisateur Ben Affleck.
Avec « Argo », il signe son troisième long-métrage, après les réussis « Gone Baby Gone » et « The Town » (film dans lequel il tenait déjà le rôle principal).

« Argo » ouvre une page de l’histoire des Etats-Unis longtemps tenue secrète. Et l’on comprend dès les premières minutes du film pourquoi Ben Affleck s’est passionné pour ce sujet en or.
Le 4 novembre 1979, au summum de la révolution iranienne, des militants envahissent l’ambassade américaine de Téhéran, et prennent 52 Américains en otage. Mais au milieu du chaos, six Américains réussissent à s’échapper et à se réfugier au domicile de l’ambassadeur canadien. Sachant qu’ils seront inévitablement découverts et probablement tués, un spécialiste de "l’exfiltration" de la CIA du nom de Tony Mendez (Ben Affleck) monte un plan risqué visant à les faire sortir du pays. Il décide pour cela de monter de toutes pièces une fausse production cinématographique de science-fiction…
Nous n’en dirons pas plus afin de ne pas vous gâcher le plaisir de cette histoire absolument incroyable.

© Warner Bros France

Ce qui frappe tout d’abord avec « Argo », c’est la volonté qu’a Ben Affleck de s’inscrire dans une certaine tradition du cinéma américain. Celle de metteurs en scène comme Sidney Pollack, Sidney Lumet et Alan J. Pakula (pour ne citer que les plus connus). De grands cinéastes auxquels on doit des films mythiques comme « Les Trois Jours du Condor », « Un Après-Midi de Chien », « Les Hommes du Président ». D’ailleurs, Affleck cite ouvertement un film de Lumet, « Network », au travers d’un personnage apparaissant dans des images d’archives (fausses ?).
La force de ce cinéma, c’est qu’il était à la fois de divertissement (jouant avec les codes des films de genre comme le suspens, etc…) mais aussi de réflexion et d’engagement politique.

© Warner Bros France

C’est donc dans cette veine que s’inscrit « Argo ». Pour s’en convaincre, il suffit de voir les premières secondes du film qui s’ouvre avec le logo de la Warner Bros, volontairement vieilli, avec des rayures sur la pellicule (ce qui n’existe plus avec les projections numériques) et un gros grain de l’image qui fleure bon le cinéma américain engagé des années 70.
C’est très fort car dès cette ouverture, Ben Affleck nous indique dans quel film il va nous embarquer. Là, on peut effectivement n’être qu’admiratif devant la capacité qu’a le cinéma américain à nous plonger dès les premières minutes du métrage au cœur de son sujet et de son récit. C’est toute la force du cinéma américain lorsqu’il est réussi. Et c’est parti pour deux heures d’un cinéma coup de poing, sans temps mort et à l’écriture rigoureuse. Tant d’un point de vue de la progression dramatique, de la psychologie des personnages, que des faits historiques relatés.

Et pour ne reparler que quelques instants de mise en scène, il faut voir cette séquence hallucinante de siège de l’ambassade de Téhéran. Là, Affleck semble s’être inspiré d’un autre grand cinéaste américain (très engagé lui aussi) des années 70-80. A savoir John Carpenter et plus particulièrement de l’un de ses meilleurs films, « Assaut ». On sort de cette séquence, terrifié, vidé, K.O. ! Voilà, un grand moment de cinéma.

Longtemps cantonné à des rôles de bellâtres, interprète assez fade, Affleck s’était révélé en acteur inspiré dans son beau polar, « The Town ». Il récidive dans « Argo », apportant à son personnage une certaine ambigüité qui fait souvent défaut à nombre de ses petits camarades. On n’est jamais mieux servi que par soi-même ! Le reste de la distribution est à l’avenant avec des acteurs exceptionnels comme Alan Arkin (« Little Miss Sunshine ») et Bryan Cranston («Breaking Bad »). Mais il y a surtout John Goodman succulent dans le rôle de John Chambers, grand maquilleur d’effets spéciaux à Hollywood, sans qui rien de cette folle histoire n’aurait été possible.

© Warner Bros France

Et si l’on excepte quelques facilités et conventions propres à ce type de films (présence très forte de la bannière étoilée, émotion parfois un peu forcée, musique assommante du français Alexandre Desplat), nous ne pouvons que vous engager à découvrir toutes affaires cessantes le dernier film de Ben Affleck. Voilà un cinéaste, c’est sûr, avec lequel il faut désormais compter.

Affiche, bande-annonce © Warner Bros France

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