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Babyshambles + Delbi à l’Aéronef

L’ovation reçue par Delbi, les mains jointes de gratitude, à la fin de trente minutes de prestation a fait chaud au cœur. Ce jeune homme talentueux découvert par hasard lors d’une première partie d’Hawksley Workman au Grand Mix n’a jamais cessé d’évoluer, de développer son réel talent, sa musicalité, sans jamais s’arrêter, un parcours très brillant. Après ce concert de Workman, on l’avait trouvé, en mai 2008, et on avait réussi à lui faire accepter de nous vendre un CDR de démos pour… 5 Euros. On n’a jamais lâché. Écoutez-le sur son site officiel, il le mérite. Rares sont les musiciens qui proposent un univers, il est sans conteste de ceux-là.

Le concert, tout le concert, rien que le concert. La musique, toute la musique, rien que la musique. C’est l’état d’esprit dans lequel on se promet d’écrire cette chronique en accostant à l’Aéronef. Inutile de suivre le Barnum pénible qui roule forcément avec Pete Doherty. Certes, il a sûrement fumé dans sa chambre d’hôtel et il y a loin du Doherty 2014 au jeune homme qui jouait braguette ouverte (Up the Brackets?) à Glastonbury en 2005 sous l’œil énamouré de Kate Moss ou qui arrivait à une répétition des Libertines sur un scooter chargé de bière en passant par la porte (!), faisant dire à Mick Jones, du Clash : « Voilà un garçon intéressant ». So What? Le dernier album ratisse large, pour ne pas dire plus, tant certaines facilités frôlent le cliché du grand catalogue des riffs qui marchent mais voilà, la perception toute française de Doherty ne doit pas faire oublier qu’il est aussi considéré en Angleterre comme un fin lettré, nourri de la fine fleur de la culture britannique, d’Oscar Wilde, notamment, ou de Genet, Baudelaire, Graham Greene, et même le très décadent Joris Karl Huysmans au point qu'il chante A Rebours... Il faut bien admettre que ça nous échappe, tout simplement. Par ailleurs, si tous les mauvais garçons devaient dégager des étagères, on aurait soudainement de la place, tant au rayon poésie qu’au rayon cds. Au fond, on s’en fout. Play.

Les Babyshambles sont au complet et le line up, pour autant qu’on sache, est celui qui est annoncé : Drew McConnell à la basse, Adam Falkner à la batterie quoique l'ont ait annoncé Jamie Morrison et Mick Withnall à la guitare, renforcés par Stephen Page aux claviers. La salle est pleine, les premiers rangs frôlent l’apoplexie permanente, l’Aéronef respire mal, et la délivrance arrive avec le Delivery de l’album Shotter's Nation qui lorgne aussi nettement sur les Kinks que Fireman louche sur les Pistols. Le public n’est pas spécialement jeune, pas spécialement branché. Time waits for no one, même pour Peter Doherty. Pas trop de portables brandis et on espère que ça continuera. Un très sympathique duo joue à un jeu qui nous a toujours laissé pantois d’incompréhension : balancer des gobelets de bière dans le public. Très drôle. Juste devant la table de mixage, encore plus drôle, non ?

Dire que Doherty n’est pas un chanteur exact est un doux euphémisme, on l’entend déjà quelque peu peiner en studio sur les aigus alors qu’on le cale, le recale, le décale autant que nécessaire… Cela dit, il chante très correctement, la voix retrouvée et c’est la première bonne surprise de la soirée, il est là, vraiment là, pleinement présent. Aucun tic pénible, on joue et on envoie Nothing comes to nothing (presque) dans la foulée. Quelques arpèges que même les musiciens ne connaissent pas entre deux mais on attend que Doherty égrène des accords reconnaissables et on envoie dur et on tape dru, Adam Falkner met tout le monde sur les rails de sa frappe lourde et parfaite. Le son est lourd, puissant, un peu pataud voire sale et un petit tour du côté du DBmètre confirme que l’on ne cesse de flirter avec les limites autorisées. On joue le mur. Mick Whitnall joue essentiellement en accords et mouline, lâchant de brefs arpèges ou de courts solos. Guitariste de Ska à l'origine, il joue très bien les contretemps. Doherty lui même n'est pas un grand technicien mais il a mieux, une patte personnelle, un toucher très spécial et extrêmement sensible.

On monte en puissance et on atteint un premier sommet avec le très touchant Stranger in my own skinMagnifique. On reste circonspect mais non, Doherty est toujours là, n’exagère pas dans la gestion du rapport au public, n’abuse pas des ateliers chœurs parfois réellement pénibles, il la joue Low Profile. Le gang qui l’entoure est très concentré et sent parfaitement que c’est un bon soir même si Drew McConnell, le bassiste, voit Peter détonner soudainement un morceau ou en changer la grille. Pas grave, il suit la progression sur le manche du patron. La machine tourne même si Doherty n’est jamais meilleur que dans les ballades fragiles, il continue à envoyer du lourd, parfois très, parfois trop. La set list prévue n’est pas respectée… Plutôt bon signe quand ce n’est pas synonyme de chaos. Très long moment avant le rappel qui sera le moment le plus faible de la soirée : un étrange passage au piano pour y jouer à peu près n’importe quoi, l’hymne un peu convenu « Fuck Forever », un geste assez stupide comme balancer un pied de micro très haut dans le public (pas de blessé) ou faire semblant de balancer le mélodica du clavier dans la foule, juste le temps de le voir pâlir. Autant de clichés en 10 minutes que lors d’un concert finalement réussi. On se plaint du calibrage parfois effrayant de certains groupes et managements pour apprécier un peu de bordel mais bon…

On se demandait si Doherty n’avait pas raison lui-même en affirmant "Give it up" dans Seven Shades mais au vu de cette prestation , ce soir là, ici, il n’y a pas de raison d’abandonner. On emprunte un vers d'After hours, la reprise du Velvet présente sur la Deluxe édition: aucune vraie réponse possible even if the night could last forever. On verra bien au prochain concert, erratique ou électrique, gracile ou fragile, fracassant ou fracassé. On jette un dernier regard pour trouver un chien pouilleux pour entonner le French dog blues que les Shambles ont joué plus tôt. Plus rien. Nothing comes to nothing.

  1. Yann Viseur

    C'est en réalité Adam Falkner sans u, (Faulkner, c'est l'écrivain) remplaçant Adam Ficek. Trois batteurs ont tenu les drums pour le groupe, dont Jamie Morrison, également batteur de tournée des Stereophonics. De loin, cheveux bouclés en commun avec Morrison obligent, et dans la mesure où L'Aéronef avait annoncé Jamie Morrison aux baguettes, je me suis trompé. Adam Falkner est effectivement aux drums, comme il l'était à l'Ancienne Belgique. Merci de votre précision. ^^

  2. Lily

    Le batteur s'appelle Adam Faulkner ^^'

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