« A part ça, tout va bien... ». Le titre du nouvel album des Beautés Vulgaires ne vous rappelle-t-il pas la célèbre phrase d'introduction du film la Haine de Mathieu Kassovitz? «C'est l'histoire d'un mec qui tombe d'un immeuble de cinquante étages. Au fur et à mesure de sa chute, il se répète sans cesse pour se rassurer: jusqu'ici tout va bien, jusqu'ici tout va bien, jusqu'ici tout va bien mais l'important, c'est pas la chute, c'est l'atterrissage.»
Ceux qui connaissent les Beautés Vulgaires trouveront peut-être la comparaison maladroite.
C'est un groupe festif, drôle et complice qui emmène à chaque concert son public dans des univers colorés, déjantés ou romantiques! Et voilà qu'on nous présente leur dernier album en le comparant à un film en noir et blanc, de plus de dix ans, qui parle de la misère économique, sociale et humaine dans nos banlieues... décidément les chroniqueurs de LilleLaNuit pètent les plombs!
Et pourtant...
Et pourtant, dés le premier morceau de l'album, les Beautés Vulgaires plantent le décor. Le duo Seb&Alex (basse/batterie) pose d'office un son puissant et massif, souligné par la distorsion d'une guitare corrosive (signée Nico). Le Rock est ici au service de textes résolument engagés. Clément, le chanteur, dresse le portrait d'une humanité larguée, perdue dans ce monde qui « marche vite, trop vite » et qui laisse nécessairement beaucoup de gens sur le bord de la route, sans parler des accidentés. Le voilà, le rapport avec le film de Mathieu Kassovitz. Une société qui marginalise est une société qui court à sa perte. Et l'on pourra toujours relativiser les choses avec des phrases du genre « mais, à part ça, tout va bien », les conséquences apparaîtront quand même un jour à nos yeux. «L’important, ce n'est pas la chute, c'est l'atterrissage.». Ce message mérite réflexion.
Les six toulousains « clament et réclament » en critiquant notamment l’univers médiatique qui met en scène des « bêtes de foire », des « animaux médiatisés».
Rassurez-vous, les Beautés Vulgaires n'ont pas complètement changé de registre. Cette introduction est vite tempérée par la chanson « laisse aller » qui elle vous livre un message plus positif, sur une musique beaucoup moins agressive où les cuivres de Punky et Sam ont toute leur place. Ce nouvel album nous invite à retrouver, malgré tout, les plaisirs simples de la vie qui font qu'elle vaut la peine d'être vécue (l'ivresse, le lien social, le silence, la liberté, les relations amoureuses, érotiques et j'en passe).
« La maman des poissons » est là pour nous rappeler que les Beautés Vulgaires savent magner le second degré et l’humour enfantin ! C’est peut-être ce qui procure à leurs prestations scéniques une telle attractivité : à leurs concerts, on danse, on chante et on déconne, et ce cocktail fait toujours plaisir à déguster.
Inutile de citer tous les morceaux de cet album pour décrire l’état d’esprit qu’il dégage. En effet, même si les Beautés Vulgaires tapent dans le mille en s’essayant à des musiques plus agressives et plus Rock ; même si leurs textes sont très largement travaillés et porteurs de sens ; il est difficile de dire que chacun des morceaux de cet album est une pure merveille. Certains sont très innovants dans le style musical et l’écriture, d’autres très représentatifs des Beautés Vulgaires, d’autres encore valent moins la peine d’être entendus et donnent l’impression d’une volonté de vouloir correspondre à des formats standards de la musique actuelle (ce qui est un procés un peu "vache", je vous l'accorde)
Le dernier album des Beautés Vulgaires, « À part ça, tout va bien… », montre à quel point il est nécessaire et positif d’innover dans la création.
Mon seul conseil sera donc le suivant: faites vous votre propre opinion en l'écoutant attentivement (ou en le découvrant en concert!)