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Paul Weller à l’Ancienne Belgique

Lorsque l’Ancienne Belgique accueille Paul Weller, le rituel est immuable. Les fans les plus motivés, pour la plupart Anglais, attendent tranquillement l’arrivée du tour bus la bière à la main à la terrasse du café qui jouxte la salle. Dans tous les concerts de Weller, et on a en a plus de 10 à notre actif, on trouve de vrais Mods, ouverts sur les musiques d’aujourd’hui comme le veut l’esprit originel du mouvement (Modernist), et d’autres, confits dans un passé sentant dangereusement le formol, revendiquant une époque qu’ils n’ont pas vécue, comme s’ils avaient vu Stevie Wonder au Flamingo en 1964. Weller adore les sixties mais il le déclarait encore très récemment, il n’y vivrait pour rien au monde (Uncut, Juin 2014) et il n’a jamais caché son aversion pour ces gardiens d’un temple infiniment trop figé.

Ça ne rate jamais, Weller se pointe vers 16 heures 30 et selon ses ever changing moods, on aura droit au passage éclair ou à une séance dédicace plus détendue. Ce sera la version quick and go pour cette fois. On avoue qu’on ne sait jamais bien quoi penser de cette attitude. Passer dix minutes avec les fans n’est pas un effort surhumain, mais on peut admettre aussi que voir, depuis le bus, les inévitables clones, ça doit être très étrange... Madame Weller descend tranquillement, Steve Cradock aussi, Steve Pilgrim, le batteur, maigre, tendu, extrêmement timide. Aucune tension, c’est le Weller continental, celui qui n’est pas l’ex leader des Jam, l’ex porte parole d’une génération, etc. Il charrie nettement moins sa propre histoire, étouffante parfois, sur le continent que sur la chère Albion qu’il définit en ces termes : Water all around. Un fan organise gentiment la collecte de tout ce que l'on a envie de faire dédicacer et le garde du corps les ramènera 90 minutes plus tard...

Seul le concert compte et l’Ancienne Belgique se remplit vite et bien, une nouvelle fois au bord du sold out alors que c’est le quatrième passage de Paul Weller et du même groupe (à l’exception de Ben Gordelier en renfort aux percussions) en 6 ans. Un concert pauvre et bâclé en 2008 au point qu’il écrive Shithole au lieu de Bruxelles sur la setlist (no comment), très compact en 2010, une très bonne seconde partie en 2012 après avoir tenté le difficile pari de jouer tout Sonik Kicks dans l’ordre. Ce soir, la partie se joue sur le mode du best of tour après la sortie de More Modern Classics (N°6 en UK) et du single d’appui Brand New Toy. Tout le monde en parle, de Miles Kane à Noel Gallagher à Sir Paul McCartney lui-même. Weller fait la couverture de Uncut. La routine, sa routine. Célébré constamment en Angleterre, heureusement qu’il est de nature terre à terre même s’il adore être Paul Weller, le King of the modern world (Uncut).

Les Gramotones, quartet très prometteur, ouvrent pour le Modfather et s’en sortent très bien, entre influences diversement maîtrisées. La belle Rickenbacker du chanteur les envoie dans les plus soyeuses pages du catalogue anglais : The Jam, Cast pour une voix qui évoque John Power, Arctic Monkeys et Miles Kane. Une belle assise scénique, une réelle qualité de compositions : à suivre, sans aucun doute. Prometteurs, comme la soirée.

Quand on a 40 ans de songwriting sous le coude et des albums aussi immenses que Sound Affects ou Stanley Road, 22 dreams, Wake up the nation et même si on a partiellement raté le dernier Sonik Kicks, on n’a que l’embarras du choix pour envoyer une Set List impeccable. Weller ne va pas se prendre les pieds dans le tapis et envoyer du lourd, du très lourd, très vite. Il déboule sur ce pas rapide et empressé qui est sa marque de fabrique et salue en inclinant le buste sans cesser de marcher. Quatre as pour commencer et mettre tout le monde d’accord : puisque c’est une tournée best of, on n’a personne à convaincre : From the floorboards up / Wake up the Nation / Fast car slow traffic / Come on let's go. Quatre tempos très enlevés et une indication très sûre quand on a révisé son petit Weller illustré, le groupe joue très bien Floorboards, et c’est toujours une précieuse indication : pas facile à jouer, parfois difficile à caler en tempo, le titre est parfaitement réussi, immédiatement, dans la veine du jeu de guitare de Wilko Johnson.

Autre signe qui ne trompe pas, Weller ne regarde aucun de ses musiciens, ne demande aucun ajustement son, secoue la tête, joue son petit pas de côté comme s’il piaffait. C’est très bon signe, l’homme ayant tendance à chercher de tous côtés une responsabilité quelconque quand ça ne va pas. La voix est impeccable et soulful. L'homme est fidèle à son code : on ne vaut que son dernier concert...

L’énergie monte pour de bon du plancher, from the floorboards up. Il est en forme, il vient de donner à Amsterdam, un concert qu’il considère comme l’un des meilleurs de sa vie. Il a viré les chansons qui étaient devenues le signal commode pour aller chercher une bière ou en assumer les conséquences au sous sol ! Plus de Wildwood, You do something to me, Broken Stones. On reprend même Foot of the mountain et autre signe de grande forme, Weller prend lui-même beaucoup de solos et joue de manière très exacte. On joue tout debout, on enchaîne vraiment très vite les changements de guitares et on se dit qu’à ce train, ça ne durera pas trois heures. On termine de fait la première partie tout en muscles nerveux et félins en 1 heure 10 et on fait littéralement péter Start ! écrit alors que les Jam jammaient sur le Taxman des Beatles, ce single à l’histoire incroyable qui intégra le top anglais alors qu’il n’était sorti qu’en Allemagne. Le son est rond, d’une densité inouïe, la basse claque le riff dans tout l’AB, déchaînée comme rarement. Weller remercie en trois mots mais on le sent heureux, il ne bâcle rien. Pas le genre atelier choral ou long discours. Ain’t no fuckin’ circus, pas de nostalgie bêta et pas d'auto célébration. On joue, point..

Premier et long rappel, hommage à Ronnie Lane des Small Faces, en Mod éternel, Out of the sinking, Stix, l’étrange Be Happy Children qui voit Steve Pilgrim prendre la partie vocale qu’assure Leah Weller sur le disque. Et de deux rappels : Wild Blue Yonder, Whirlpool’s end. Dernier faux départ pour revenir mettre tout le monde à genoux sur Changingman, nouveau véritable signal de fin comme a pu l’être Town called malice pendant des années. Rien de nouveau sous ce très beau ciel wellerien, Wild and Blue, et forcément, en vrai mod, on attend les nouveautés, pour l’instant coincées dans son auto radio et que seul un journaliste anglais a pu écouter. Et si on braquait sa voiture, le traffic est lent à la sortie de l'AB... Fast car, slow traffic...

Set List : From the floorboards up / Wake up the Nation / Fast car slow traffic / Come on let's go / Sea spray / My ever changing moods / Foot of the mountain / The Attic / Tales of the riverbank / Going places / Friday street / Porcelain Gods / Dangerous age / Above the clouds / Dragonfly / Seven and Three / Peacock Suit/ Start. Encore 1: He's the keeper / Out of the sinking / Picking up Sticks / Be happy Children / Encore 2: Wild blue Yonder / Whirlpool's end. Encore 3: The Changingman.

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