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« Encore Heureux » : Comédie à l’italienne pour Sandrine Kiberlain et Edouard Baer

Synopsis : D’accord, Marie est un peu fatiguée de l'insouciance de son mari Sam, cadre sup au chômage depuis 2 ans. D'accord, elle est très tentée de se laisser séduire par ce bel inconnu qui lui fait la cour. D'accord, il y a aussi le concours de piano de sa fille... Si cet équilibre dingue et léger tient à peu près debout, un événement inattendu jette toute la famille sur un chemin encore plus fou.

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Baer et Kiberlain ont bien fait de miser sur le film de Benoît Graffin : Encore Heureux


Critique :
Et si on se faisait plaisir cette semaine dans l’Actu Ciné de Lille La Nuit ? Si on décidait d’évoquer une comédie française ? Légère mais pas que… Amusante mais pas que… Cocasse mais pas que… Si on parlait d’un long-métrage réjouissant, parfois insolent et dont on ressort le sourire aux lèvres ?

Allez, on y va ! Ce film, Encore Heureux, est réalisé par Benoît Graffin, qui signe son troisième long-métrage et fut scénariste pour Pierre Salvadori.

A vrai dire, Encore Heureux, pourrait être totalement plombant. On y parle de chômage, d’un « loser », de la société de consommation, d’une femme qui se pense délaissée, de quelques autres sujets graves et même d'un cadavre. Mais Graffin a l’élégance de parler de ces thèmes par le biais de la comédie - vous savez, ce genre que tout le monde aime mais qui reste trop méprisé par une certaine critique car une comédie, ce n’est pas sérieux -.

Graffin a eu l’intelligence de faire appel à Nicolas Bedos, Deborah Saïag et Mika Tard, qui lui ont signé des dialogues très drôles (c’est rare en ce moment dans les productions hexagonales), finement ciselés et dont on sent que les acteurs on eu un plaisir immense à les jouer.

Acteurs ! Le mot est lâché. Ils sont bien évidemment un grand bonheur du film. Inutile de vous dire que lorsque l’on a devant sa caméra cette nouvelle reine de la comédie qu'est Sandrine Kiberlain et cet impayable dandy de Edouard Baer, on serait vraiment un manche de rater son coup !

Heureusement, ce n’est pas le cas. On croit dur comme fer à ce couple dans la mouise, à cette femme énergique mais quelque peu désemparée, à ce brave gars lunaire faussement désinvolte. Preuve en est que nous avons tout de même dans nos contrées de chouettes acteurs, qui peuvent avoir la finesse de jeu, la fantaisie et une pincée de gravité dont étaient capables quelques-uns de leurs glorieux aînés.

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La complicité est sur l'écran comme elle l'était lors de notre entretien.


Lille La Nuit a profité de la venue à Lille des deux comédiens, accompagnés de leur metteur en scène pour les rencontrer.
Cela a commencé fort dès les premières secondes grâce à un Edouard Baer en pleine forme :

« Mettons un peu les choses à plat. On va pas se mentir. On va parler vrai ! Vous l’avez vu quand ? Ça s’est bien passé ? Il est bien le film, hein ? On n’en fait pas toujours des bons. Donc quand on en fait des bons, il faut le dire ! Mademoiselle Kiberlain en fait des bons. Moi, non ! Hé bien regardez ma filmographie depuis dix ans… ».

Evidemment, il en rajoute le Baer ! Mais il n’a pas totalement tort. Malgré la décontraction du moment et la légère déconcentration qui s’ensuit, on ne se laisse pas démonter.

Donc, on pose notre première question - classique mais indispensable -: qu’est-ce qui a séduit les deux acteurs dans Encore Heureux et quelle vision ont-ils du film ?

Sandrine Kiberlain : « C’est ce doux mélange entre l’humour et la tendresse dans le film qui fait son charme. Et c’est ce qu’il y a de plus difficile à faire sans doute. C’est un film très bien dosé, très bien écrit et en même temps, ça reste très vivant. Et c’est amoral ».

Edouard Baer : « Et puis, oui, il y a le mauvais esprit aussi ! Il y a tout de même des gens qui se baladent pendant la moitié du film avec un cadavre. On se demande si on doit être gêné ? Si on doit être de leur côté ou pas ? On est habitués à se poser des questions morales. On aime bien normalement dans les films que les gentils soient vraiment gentils. Là, ils sont dans un bordel… Mais bon il y a une urgence, c’est ça qui fait aussi ce truc de comédie. Tout ça se passe en une nuit, il y a un bordel… Donc tout ça fait qu’on n’a pas le temps de se demander si on a raison de rire ou pas. »

Petite confession de notre part : Pour tout vous dire, il arrive qu'on sente certains acteurs pas très concernés lors des entretiens (pas tous, heureusement). Ils font la promo car cela fait partie du taf. Point barre ! Chez Baer et Kiberlain, on ressent l’impression inverse. Ils ont aimé le film. Et sont heureux de l’accompagner.

Il est vrai que Encore Heureux sort du tout-venant de la comédie française. Le film a des petits défauts  - nous y reviendrons - mais quand les deux acteurs parlent de mauvais esprit, d’amoralité, ils ont raison.

On sent que le réalisateur Benoît Graffin connaît quelques classiques par cœur. Plus particulièrement ceux du cinéma italien. Toutes proportions gardées, on retrouve dans Encore Heureux, l’esprit des grandes comédies italiennes qui mêlaient le social, la tendresse, à un humour noir des plus revigorants. Encore Heureux peut se voir comme un hommage aux maîtres transalpins qu’étaient Monicelli, Risi, Ettore Scola - le grand réalisateur de Affreux, Sales et Méchants, disparu le 20 janvier dernier - et quelques autres noms de ce cinéma aujourd’hui, hélas, disparu.

Bien sûr, on ne retrouve pas dans Encore Heureux la mécanique de précision de ces films. Le script est parfois davantage un prétexte pour aligner les bons mots - excellents, on persiste et signe - et de beaux numéros d’acteurs (Bulle Ogier, qu'on retrouve enfin, est merveilleuse et les gamins aussi).

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Bulle Ogier (au centre) actrice emblématique des films de Rivette et Schroeder

Mais l’esprit est là ! Il y a cette volonté de livrer une comédie populaire qui soit intelligente. On retrouve cette classe qu’avait la comédie italienne de rire avec les personnages et non des personnages - tout en pouvant être sacrément féroce -. C’est ce qui sépare le long-métrage de Benoît Graffin de ces films comiques français mal torchées, qui méprisent leurs personnages et, par conséquent, leurs spectateurs. Le réalisateur lancera d’ailleurs comme un cri du cœur lors de l’entretien : « J’adore Vittorio De Sica. C’est mon maître ! C’est mon dieu ! ».

Mais surtout ne pensez pas que Encore Heureux soit un film référentiel. Pas la peine de vous plonger les classiques du cinéma italien pour l'apprécier (mais si vous avez envie, allez-y, car ça fait du bien). Encore Heureux est avant tout une comédie sympathique, bien zinzin, qui vous fera passer un excellent moment. C’est beaucoup par les temps qui courent. Alors à Lille La Nuit, évidemment, on prend !

Encore Heureux
Réalisateur : Benoît Graffin
Casting : Sandrine Kiberlain, Edouard Baer, Bulle Ogier, Benjamin Biolay
Durée : 1h33
Sortie salles : 27/01/2016
Affiche, photos et film-annonce © EuropaCorp Distribution

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