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Charlélie au Métaphone

Le Métaphone impressionne, d’un cachet inouï, à l’extérieur comme à l’intérieur. Le public de ce soir, c’est la foule des gens qui ont croisé la route de CharlÉlie Couture, 35 ans de musique au compteur, qu’on ait volé avec son avion sans ailes, récité ses Poèmes rocks, suivi ses aventures à Melbourne Aussie ou ses errances de NewyorCoeur, qu’on vienne de le (re)découvrir sous la production soyeuse de Benjamin Biolay, Il a été présent pour tous et nous le connaissons comme un ami. La relation a parfois été plus lointaine, on a parfois oublié de s’appeler mais comme avec les vieux amis, la conversation reprend là où elle s’est arrêtée, sans le moindre silence gêné. Elle commence même avant l’apparition de CharlÉlie, qui entame son Appel à l’aide depuis les coulisses, porté par un groupe absolument impeccable, notamment le très hendrixien Karim Attoumane qui l’accompagne depuis une dizaine d’années. La cohésion d’ensemble impressionne, autant que les décalages qui donnent le ton de la soirée : on ne jouera pas la même chose que lors des tournées précédentes et si c’est le cas, on ne le fera pas de la même façon. Le son est immédiatement fantastique, la scénographie remarquable, quatre panneaux dessinés par CharlÉlie ornant la scène, sous un vélo suspendu artistiquement, tout est net, élégant, comme les fines rayures du costume du compositeur "multiste", nom qu'il donne aux artistes qui étendent leur art à différentes activités.

Aucun temps mort. On ne lèvera un peu le pied que pour le climatique Tchao Pantin. Si on a connu CharlÉlie un peu bavard, c’est qu’on le suit depuis ses premiers concerts lillois aux côtés d’Alice Botté  et de Jerry Lipkins aux claviers au milieu des années 80. Aujourd’hui, s’il sait parfaitement établir le contact avec le public, c’est d’humour matois et d’allusions fines qu’il nourrit son discours, toujours élégant et sobre, même quand il remercie ses techniciens en termes choisis « Merci à ceux qui, en silence, nous amplifient, et dans l’ombre, nous éclairent ».

Le groupe est fantastique, Denis Bennarosh et Bobby Jocky drivent tout le monde, le répertoire est choisi avec tact, ne sombre pas dans la nostalgie empoisonnée, ne renie pas le lustre éclatant d’un passé assumé. Comme un avion sans ailes sera présentée comme une chanson qui lui a permis de décoller, un miracle momentané. On entend clairement le public réagir au tout premier accord du Loup dans la bergerie, qui fera surgir du bois un intrus très malicieux, le loup Hendrix et ses quelques mesures de Voodoo Child sous la patte agile de Karim Outtemane. Ce n’est pas souligné, c’est au passage, malin comme les textes qui jouent avec les mots, entre poésie, métaphores, images personnelles, langage de tous les jours, parce que c’est la vie. On ne franchit jamais les limites de l’écriture opaque ou des strophes qui ne célèbrent qu’un auteur seul à se comprendre. CharlÉlie le dit lui-même, il partage et raconte des histoires auxquelles il croit, ajoute que c’est une question de foi, que la vérité des uns n’est pas toujours la vérité des autres, que d’une façon générale il est obligé de croire à sa vie, c’est plus facile comme ça. Peut être songe-t-il à Oignies en jouant La Vague, et ses paroles qui font particulièrement mouche ici, au cœur des souvenirs fantômes d’une ville minière. C’est une histoire, on y croit, ou on n’y croit pas. Le Vieil Homme voit CharlÉlie quitter le clavier et incarner toute la chanson, d'un bout à l'autre, avec ce qu'il faut d'intensité pour y croire, jusqu'à l'orage électrique déclenché par les spots.

Set List Charlélie

On se rend compte qu’on avait peut être un peu oublié à quel point la musique de CharlÉlie est dense, riche, enveloppée et chaude, qu’on avait peut être un peu oublié, quand on l’entend dialoguer avec Emmanuel Trouvé, à quel point son jeu aux claviers est riche de nombreux registres, jazz, blues et savants contretemps. Qu'on avait oublié à quel point on a besoin de gens comme lui. En tout cas, deux heures plus tard, après un concert extrêmement chaleureux, au cours duquel chacun a forcément revu passer quelques instants de sa vie, on connaissait le nouveau statut de l’artiste multiste, ImMortel.

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