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Chali 2 Na with Live Band & Les Grandes Gueules à De Kreun

C’est un peu comme des orphelins à la recherche de consolation que le public s’est rendu le 4 décembre 2009 au De Kreun de Courtrai. Orphelins d’un groupe, Jurassic 5, qui aura littéralement marqué l’histoire du hip hop avec des albums aussi importants que J5, Power In Numbers ou Quality Control, et leur son old-school transpirant le funk le plus organique. Groupe qui, malheureusement, a splitté en 2007 après 15 ans de bons et loyaux services à la cause hip hop.

 

Ce soir, c’est sans son crew d’origine que l’un des leaders les plus charismatiques de cette formation historique, Chali 2 Na, MC à la voix de baryton, vient présenter son premier opus solo, Fish Outta Water. Et malgré l’indéniable qualité de cet album, on ne peut s’empêcher de ressentir quelques craintes et d’avoir l’esprit taraudé par de multiples questions : la magie sera-t-elle encore là ? que donnera la prestation de ce MC au flow grave et linéaire en dehors du contexte dans lequel on l’a toujours passionnément écouté ? quelle sera l’importance du live band accompagnant pour l’occasion l’artiste ? que dois-je commander au bar, une bière ou un whisky ? (Euh, non, ça c’est hors-sujet).

C’est donc impatiemment que le public ronge son frein en attendant le messie. Impatience qui ne sera pas calmée, loin de là, par Les Grandes Gueules, groupe originaire de Sète. Une apparition scénique que l’on peut résumer avec le titre du dernier morceau interprété par le groupe : « A quoi ça sert ? ». En effet, « A quoi ça sert » de jouer un hip hop aussi stéréotypé, gangrené par les clichés (la société, c’est pas bien, les gens y sont pas gentils, on est tous des victimes…) et aussi faible musicalement ? L’exemple type du groupe dont les références musicales se limitent à la programmation sans intérêt (Booba, Sinik, 113…) des stations de FM françaises, Skyrock en tête. De quoi mettre de l’eau au moulin des détracteurs du hip hop qui, à l’instar d’Eric Zemmour, considèrent « le rap comme une musique d’analphabètes ».

Fort heureusement, Chali 2 Na et son groupe ne tardent pas à faire leur apparition. Et, en quelques secondes, la magie opère. Le charisme de l’artiste, même en solo, crève toujours autant les yeux et sa présence réchauffe instantanément la salle. Tout le monde se met à sourire béatement et à remuer la tête comme au bon vieux temps du Jurassic 5. Le chanteur détend même encore plus l’ambiance en invitant chacun des membres du public à serrer la main de ses voisins et voisines.

Et surtout, quelle prestation ! Accompagné d’un clavier, d’un batteur, d’un bassiste (basse 7 cordes, c’est assez rare pour le préciser) et de son jeune frère, le MC Laidlaw, Chali 2 Na impose sans mal son propre univers en piochant généreusement dans une palette d’influences nettement plus décelables qu’à l’époque du J5. Car Chali 2 Na et son groupe ne se limitent pas uniquement au hip hop et s’en vont titiller des sonorités reggae, soul voire rock pour une diversité qui fait mouche. Et inutile de rappeler à quel point cet artiste soigne le fond, affichant modestement sa maturité et cela sans jamais se poser comme donneur de leçons. Les craintes ressenties plus tôt se dissipent car il apparaît évident que, quand beaucoup de MCs vivent éternellement dans l’ombre de leur défunt groupe, Chali 2 Na, lui, parvient à s’assumer tout seul et même à se dévoiler en tant qu’homme.

Contrairement à ce qu’on aurait pu penser de prime abord, on ne s’ennuie donc pas une seconde. Chali 2 Na alterne chansons de son album solo « So Crazy » aux synthés saccadés rappelant le générique des séries policières américaines des 70’s, « Welcome To The Fish Market » aux claviers rétros, le soulful « Don’t stop » ou l’hymne aux graffitis « Graff Time » (rappelons que l’artiste est également un graffeur reconnu) et classiques du J5, chaleureusement accueillis par le public, tels que « Freedom », « What’s Golden » ou encore « Quality Control ». Et cela sans oublier de rendre hommage à ses pairs et aux artistes qui l’ont inspiré : Michael Jackson (avec une magnifique intervention vocale du clavier reprenant des classiques des autres J5, les Jackson Five’s), James Brown ou, surprise, Aérosmith avec la reprise de « Last Child ». Le tout parfaitement accompagné par un groupe excellent, dont la puissance de feu rappelle celle du groupe The Roots et de son « petit mais costaud » frangin Laidlaw, MC qui n’a rien a envier au talent de son grand frère.

Mais ce que l’on retiendra surtout, c’est l’extrême gentillesse de cet artiste, plaisantant avec son public entre chaque morceau, et le plaisir qu’il a pu prendre avec son groupe (le bassiste n’a jamais cessé de sourire de tout le concert !) de jouer dans une petite salle alors qu’il a rempli les plus grandes salles à travers le monde. Chali 2 Na et ses musiciens ont d’ailleurs, une fois le set terminé, rejoint le public pour le saluer et discuter avec lui en toute simplicité.

RESPECT !!!

 

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