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Stupeflip + The Bewitched Hands + Pumpies Voyagerz au Grand Mix

Concert gratuit. Une expression qui n'est plus uniquement synonyme de venue d'un chanteur de variétés sur le retour rappelant peu avant le feu d'artifice du 14 juillet sur une scène minable installée au fond de la place d'un village que « Capri, c'est fini ». Non, non, non. Les radins, les fauchés, les curieux n'ont jamais été aussi heureux qu'en cette douce période qui est la notre. Sergent Garcia, il y a quelques semaines sur le campus de Lille I. Seun Kuti à Lille Sud le 05 juin. Mardi Gras BB le 24 juin à Dunkerque. Archive le 09 juillet à Béthune. Cali le 13 juillet à Liévin. Des évènements musicaux de grande ampleur où il n'est nul besoin de débourser le moindre kopeck s'annoncent un peu partout dans notre généreuse région.

 

Et, en ce soir du 26 mai, c'est aussi sans racler le fond de ses poches que l'on franchit l'entrée du Grand Mix pour assister à une des soirées organisées sur tout le territoire par la station de radio Le Mouv'. Une Party mettant à l'honneur deux groupes français aux univers radicalement différents: les Hippies modernes de The Bewitched Hands et les sociopathes du Stupeflip, de retour dans la métropole deux mois à peine après leur passage halluciné à l'Aéronef le 02 avril. Et, pour éviter tout temps morts, le duo Electro Pumpies Voyagerz qui, en faisant parler ses machines, apporte une dimension clubesque à la salle de concerts.

Cheveux longs, barbes, petites lunettes, chemises à carreaux, tronches de Geeks et d'ados attardés, les Bewitched Hands sont les premiers à monter sur scène. La petite tribu (5 garçons et une fille) démarre en douceur avec le single « Happy With You ». Une judicieuse introduction. Car la Pop-Folk teintée d'influences Country et Rock des sixties ou du début des seventies de ce groupe agit tel un charme et rend béatement heureux. Un bonheur simple, naïf et léger. Des compositions aériennes à la redoutable efficacité qui donnent envie de taper du pied, d'enlacer son voisin ou sa voisine, de lui brandir un collier de fleurs et de l'inviter à courir nu en sa compagnie dans un champ de coquelicots sous un soleil couchant. Une Petite Maison Dans La Prairie musicale où Charles Ingalls aurait troqué ses habits de paysan contre une tunique bariolée et un pantalon pattes d'eph. Loin de la prétention artistique de tous ces groupes actuels voulant vainement réinventer le Rock, les Bewitched Hands affichent clairement leurs influences: le psychédélisme flower power des Kinks, des Beach Boys période Pet Sounds, des Buffalo Springfield. Magie des harmonies vocales, ambiances Peace & Love, mélodies subtiles et enchanteresses, la machine à explorer le temps fonctionne parfaitement. Mais le groupe ne s'impose pas seulement comme un ensemble d'élèves appliqués. Les musiciens insufflent une réelle personnalité à leurs chansons. Amènent une tension du plus bel effet comme sur la magnifique « Hard To Cry » et son irrésistible montée en puissance. De la Pop au sens noble du terme. Universelle. Qui vous colle instantanément à la peau et aux oreilles pour ne plus vous lâcher.

 

Stupeflip avait marqué les esprits lors de son récent passage à Lille. On s'attendait donc à un nouveau coup d'éclat. Malheureusement, le groupe a rappelé qu'il était capable du meilleur comme du nettement moins bon sur scène. Julien Barthélémy, la tête pensante du Crou le plus stupéfiant de la planète, a d'ailleurs l'honnêteté, en interview, de dire que le Live n'est pas son exercice préféré.

Difficile, en effet, pour celui qui a assisté à la date précédente donnée à l'Aéronef de ne pas faire la fine bouche. Si le concert n'est pas catastrophique car fidèle à l'énergie Punk et à l'esprit anarchique présents sur les albums, on ne peut s'empêcher d'être déçu. Le souci de retranscrire parfaitement l'univers apocalyptique et régressif du Stup est palpable. La mise en scène est soignée. Les projections vidéos et les jeux de lumière installent une atmosphère inquiétante. Les changements de costumes donnent vie aux multiples personnages du Crou (Cadillac, King Ju, Pop Hip...). Néanmois le show est bancal. Manque de précision. Le groupe a choisi, sûrement pour ne pas donner l'impression de se répéter, de changer sa set-list et l'ordre des chansons. Attention honorable. Mais qui n'a pas été assez réfléchie. Le concert semble trop souvent improvisé. Des flottements, des baisses de rythme se font ressentir entre les morceaux. Empêchant ainsi une réelle tension de s'installer.

Moins carré et préparé, le spectacle, paradoxalement, semble également manquer de folie et de vie. L'ensemble reste trop sage (pour un concert de Stupeflip, entendons-nous). Le public, à l'exception des fans acharnés du premier rang, montre peu de motivation. Pas de pogo. Pas de slam. Pas de jets de bière. Peu d'insultes. Pas d'appel au meurtre pour éradiquer le pauvre Pop Hip, ce minable mais si attachant chanteur de variétés, de la surface de la terre. Le coeur n'y est pas. Y aurait-il trop de curieux et pas assez de fans?

Les membres du Stup, eux, sont visiblement énervés par des problèmes techniques. Ils se plaignent du manque de retour les empêchant de s'entendre. King Ju annonce qu'il ne viendra plus jouer dans cette salle. Il provoque les spectateurs. Ne donne qu'un triste 12 sur 20 aux pauvres diables qui se démènent devant la scène. Et injurie les autres. Cela n'a pas l'effet escompté. Toujours pas de mouvement de foule. Aucun pétage de plombs à l'horizon. Par sadisme, les morceaux tant attendus par les fans n'arrivent jamais. « La Menuiserie » ne sera pas jouée. De même que le puissant « Sinode Pibouin ». « Hater's Killah » ou « Stupeflip Vite » en raison de ce manque cruel d'interaction sont platement interprétées. Le concert s'arrête au bout d'une heure. Sur « A Bas La Hiérarchie » (la hiérarchie du public?). Très court. Même pour un groupe qui n'est pas réputé pour jouer longtemps. King Ju crée alors la surprise en revenant sur scène (car le fan sait très bien que le Stup ne tombe pas dans l'hypocrisie du rappel). Mais c'est uniquement pour dire aux spectateurs « d'aller se faire mettre ».

Un happening foutraque, limite foutage de gueule: voilà ce que l'on retiendra principalement. Pourtant, malgré la déception, aucune raison d'en vouloir au Stup. En se posant en poil à gratter ne respectant pas les conventions, la bienséance ni même ses fans, en refusant de livrer une prestation lisse et de brosser le public dans le sens du poil, cette formation reste en fait loyale à ses idéaux Punks et à son anticonformisme. En fait, personne ne mérite peut-être de voir gratuitement Stupeflip!

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