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DJ Q-Bert + DJ Food & DJ Cheeba & DJ Moneyshot à L’Aéronef

Scratch Boom Hue.
Ce soir, L'Aéronef fait tourner les platines et met la culture DJ à l'honneur. Du pain béni pour les passionnés de Turntablism pour qui les termes quelque peu barbares de Crossfader, Pass-Pass, Beat Juggling, Body Tricks, Freestyle Scratch, Hamster Style n'ont aucun secret.

D'autant plus que la salle lilloise peut s'enorgueillir de recevoir pour l'occasion des cadors de la discipline. Une figure incontournable, triple champion du monde DMC : le légendaire DJ Q-Bert. Et, issus de Ninja Tune, label phare de la musique électronique, un trio de platinistes composé de DJ Food, DJ Cheeba et DJ Moneyshot qui, à six mains, relèvent un pari un peu fou : déconstruire et recréer le séminal album des Beastie Boys de 1989, Paul's Boutique. Cela en s'appuyant sur l'ensemble des samples utilisés par les trois frappa-dingues de Brooklyn lors de la conception de leur chef-d'oeuvre.

Une prouesse artistique. Digne des douze travaux d'Hercule. Car reposant sur un tracklisting impressionnant de plus de 150 échantillons musicaux. Sur lesquels viennent se greffer, bien évidemment, les voix de Mike D, d'Ad-Rock et du regretté MCA. Les cuts sont précis et les trois DJ's, dont les techniques et les spécialités diffèrent, font preuve d'une belle complémentarité. Loin d'être une simple démonstration de turntablism, la performance se révèle très musicale et ravit aussi bien les puristes que les curieux présents dans la salle.

L'hommage est loin d'être mortifère. Il est plein de vie. S'apparente à une véritable orgie où on passe nonchalamment d'une sonorité à une autre. Divers univers musicaux s'accouplent lubriquement. Une débauche musicale fréquentée par les plus grands: Bob Marley, Kool And The Gang, Kurtis Blow, Donny Hathaway, Curtis Mayfield, Led Zeppelin, Tower Of Power, Elvis Costello, The Isley Brothers, Alice Cooper, Public Enemy, Eagles, Sly And The Family Stone, Cameo, The Beatles, Johnny Cash, Run DMC... La liste des partouzards est trop longue.

Une mixtape épique en forme de lettre d'amour envoyée à l'un des groupes de Hip Hop les plus influents de la planète. Reconstituant affectueusement son côté foutraque, son énergie de sales gosses, de cancres surdoués. Un patchwork à la fois musical et visuel. Sur un écran placé derrière les trois DJ's viennent défiler des images d'archives des Beastie Boys, des artistes samplés, des extraits de films (L'Homme des Hautes Plaines, Délivrance, Psychose, Les Dents De La Mer, Superfly, Pump Up The Volume ou autres joyeusetés pulmonaires de Russ Meyer) ainsi que de nombreux cartoons. Un énorme bordel dont on ressort avec le sourire. Transpirant la science du turntablism tout en se débarrassant de ses pièges, de son penchant trop souvent démonstratif, pour mieux retrouver l'esprit dance-floor qui doit l'animer.

Avec DJ Q-Bert, l'ambiance se fait plus austère, moins fantaisiste. Pas de montage vidéo pour venir illustrer sa prestation. Ne sont diffusés, sur l'écran situé en fond de scène, que les gestes habiles et minutieux du turntablist. Qui jongle avec les rythmes, s'amuse avec le volume pour faire tituber les sons, les faire bégayer. Une étrange chorégraphie rappelant à quel point une platine est un instrument à part entière. Demandant un réel savoir-faire, un sens de la mesure et du timing. L'outil est différent mais il débouche sur de la musique.

Le résultat, s'il peut sembler aride ou hermétique pour les non-initiés, est fascinant. Q-Bert provoque les dogmes afin de générer un art hybride, quelque part entre la musique répétitive, concrète, le Hip Hop instrumental et l'Electro avant-gardiste. Dans l'excellent documentaire Scratch consacré au Turntablism réalisé par Doug Pray, le DJ expliquait qu'il cherchait l'inspiration en imaginant la musique qu'écoutaient des civilisations extra-terrestres dont l'évolution serait supérieure à la notre. Prenant appui sur ses deux récents derniers albums, les bien-nommés Extraterrestria et Galaxxxian, il se fait ainsi, en live, l'architecte d'une cathédrale sonore futuriste, protéiforme, aux arabesques improbables. Entre scratchwork incroyable et expérimentations, le platiniste multi-primé repousse encore une fois les limites de son art. Jusqu'à des espaces encore inconnus de l'homme...

Y a pas à dire, c'est beau une platine la nuit.

 

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