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Iphigénie en Tauride au Théâtre du Nord

Réécriture de la tragédie grecque d’Euripide, Iphigénie en Tauride clôture la malédiction des Atrides. Tantale, Pélops, Atrée, Thyeste, Agamemnon, Clytemnestre, Oreste, Electre : voici les membres de la terrible famille à laquelle appartient Iphigénie. Chaque génération a eu son lot de sang, la vengeance appelle la vengeance entre les membres de cette famille maudite des dieux : l’oncle tue ses neveux, l’épouse tue son mari, le fils tue la mère, etc. Et Iphigénie ? Vierge pure consacrée à Artémis, elle est là pour mettre fin au cycle de la vengeance.

Les dieux avaient demandé à Agamemnon qu’il sacrifie sa fille : tel était le prix du départ pour la guerre de Troie. Mais au dernier moment, Iphigénie a été protégée par la déesse Artémis, qui l’enveloppa dans un nuage pour la transporter en Tauride, terre barbare qui avait pour coutume de sacrifier les étrangers. Iphigénie, cachant son origine grecque et sa naissance, devint en Tauride prêtresse d’Artémis, mit fin aux sacrifices humains et fut par-là respectée par tous, à commencer par le roi Thoas, qui aimerait qu’Iphigénie accepte enfin de l’épouser. Mais le cœur d’Iphigénie est grec, sa patrie est grecque, elle attend qu’on la ramène chez elle, auprès des siens.

Thoas (Alain Rimoux) perd patience face au refus d’Iphigénie. Il décide de rétablir les sacrifices sanglants, et ordonne à la jeune fille de sacrifier au plus vite les deux étrangers qui viennent d’être capturés sur le rivage. Le destin est cruel : il s’agit d’Oreste (Vincent Dissez), le frère d’Iphigénie, et de Pylade (Pierre-François Garel). Oreste vient de tuer leur mère, et arrive sur scène pris de folie. Seule Iphigénie parviendra à lui faire retrouver la raison...

Le personnage d’Iphigénie est interprété par Cécile Garcia Fogel, que l’on ne présente plus au théâtre du Nord : Marie Stuart, Phèdre, et maintenant Iphigénie, l’héroïne qui chez Goethe refuse les lois sanglantes des hommes. Si Cécile Garcia Fogel est actuellement très recherchée par les metteurs en scène, son jeu, sa voix, très particuliers, peuvent surprendre et l'emporter sur le texte. Femme qui dit non aux mensonges et à la violence, elle incarne la fin du tragique pour apporter la paix et l’équilibre. Son discours sur les étrangers est encore plus touchant pour un spectateur de 2016 qui ne peut manquer de faire un rapprochement avec la question des migrations en Europe. Qui est l’étranger ? Comment l’accueillir lorsqu’il arrive sur nos côtes ? Faut-il le sacrifier ou lui accorder le droit d’asile ? Le drame romantique de Goethe, relu à la lumière de notre actualité, prend alors toute sa force, comme avait déjà pu le faire Irène Bonnaud avec Retour à Argos, adaptation d’une tragédie d’Eschyle. Le théâtre grec ne cesse ne nous questionner.

L’autel sanglant, au centre de l’espace scénique, rappelle sans cesse le sort réservé aux étrangers arrivant en Tauride. Les échanges et les déplacements entre les acteurs se font souvent autour de lui, il les sépare, l’un voulant le sang, l’autre la paix. Œuvre lyrique, Iphigénie en Tauride traduit les espoirs passionnés d’une nouvelle société, que l’on aimerait, nous aussi, voir advenir…

A voir au Théâtre du Nord du 5 au 9 octobre 2016

 

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