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C’’est pas pour me vanter d’’Eugène Labiche au Théâtre du Nord

Ce spectacle est composé de deux pièces de Labiche : La Grammaire et 29 degrés à l’ombre ; toutes deux engagent une réflexion toujours d’actualité : qu’est-ce qu’un bourgeois ? A quoi le reconnaît-on ? Chaque volet de ce diptyque offre un élément de réponse qui éclaire cette problématique. 

Dans La Grammaire, nous voyons un notable de province ambitieux, en pleine campagne électorale ; il passe aux yeux de ses voisins pour un savant ; sa première apparition sur scène, on le trouve livre en main ; cependant, il ne maîtrise pas la grammaire et vit cela comme une honte ; c’est sa propre fille qui lui écrit ses discours. Et aujourd’hui, pour son malheur, tout le monde semble vouloir le faire écrire, ce qui le plonge dans un état proche de l’angoisse ; mais cela est surtout créateur d’un rire franc.

Dans 29 degrés à l’ombre, nous découvrons un autre visage du bourgeois ; il s’agit d’un homme de la Troisième République, qui parle de construire une école avec l’argent perdu au jeu par ses amis ; l’instruction devient par là le symbole d’une perte et non d’un gain. Mais bien plus, ce bourgeois questionne le rapport à l’honneur. En effet, alors qu’il surprend un homme en train d’embrasser sa femme, ce bon bourgeois, empli de colère, et cherchant réparation, ne cesse de tergiverser tant il est peureux : l’amant surpris va-t-il se laisser battre ou va-t-il se défendre ? Pour un homme qui est tout en parole, le passage est l’acte est alors difficile ; et les moments où il est pris en défaut sont de purs moments de comédie.

Le décor est simple et efficace : des panneaux de bois avec des ouvertures, autour desquelles les acteurs vont effectuer un réel travail dans la maîtrise de l’espace. Une lumière chaude symbolise le Sud de la France. Des costumes très stéréotypés viennent accentuer la réflexion qui s’instaure autour du monde de la bourgeoisie. Entre les deux pièces, les acteurs se changent en partie sous nos yeux ; il ne leur faut que quelques minutes pour endosser un nouveau rôle qui n’est pas toujours très différent du premier ; c’est toujours cette bourgeoisie que l’on cherche à appréhender ; bien sûr, on en rit, mais au fond, de qui rit-on ? des personnages, certainement ; de nous ? un peu…et peut-être même plus qu’un peu. Derrière ces personnages assez fanfarons, assez prétentieux, c’est nous qui sommes visés, chaque fois que nous jouons avec les apparences. Labiche nous force à réfléchir sur nous-mêmes, sans pour autant être amer ou acerbe ; la critique est douce, mais ne manque pas sa cible.

Un spectacle qui, s’il nous amène à réfléchir sur nous-mêmes, n’en oublie pas moins son objectif principal : susciter le rire du public, conquis pas l’enthousiasme et le talent des acteurs.

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