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Pablo Moses au Grand Mix

Soul Music et Reggae ont toujours été très intimement liés. Comme mère et fils. En s'accouplant, dans les années 60, avec le Rocksteady et le Ska jamaïcain, la lubrique américaine a, en effet, donné naissance à la musique préférée des fumeurs de pétards. Il n'est donc pas étonnant, en raison de leurs gênes communs, qu'ils partagent autant de similitudes. Dans les thématiques abordées: la spiritualité (God d'un côté, Jah de l'autre), les revendications politiques et sociales, l'amour, le plaisir lié à la sexualité...

Mais ce qui rapproche le plus ces deux styles musicaux est le fait qu'ils restent relativement méconnus du grand public. Les arbres cachant la plupart du temps le reste de la forêt. Ou le champ de ganja. Aux USA, pour un James Brown ou un Otis Redding sanctifié, combien de William Bell ou de Arthur Conley relégués dans les oubliettes de l'Histoire? En Jamaïque, pour un Bob Marley ou un Peter Tosh porté aux nues, combien de Leroy Smart, Junior Murvin ou de Johnny Clarke restés dans un relatif anonymat?

Pablo Moses fait partie de ces outsiders. Pourtant sa contribution est loin d'être négligeable. Ses deux premiers albums, Revolutionary Dream (1975) et A Song (1980), sont considérés par les initiés, pour leur suavité et leur richesse mélodique, comme des classiques du genre. Après un silence discographique de 15 ans, le Moïse jamaïquain s'est rappelé à notre mémoire avec un nouvel album, judicieusement intitulé The Rebirth. Un album inspiré, dynamique et enjoué, laissant une grande place aux cuivres.

Son retour sur scène était donc à ne pas rater. Curieusement, alors que les concerts de Reggae attirent en France, même sans publicité, tout un sillage d'adeptes, le Grand Mix, ce soir, peine à se remplir. Quand on vous dit que Pablo Moses est un outsider, en voilà la malheureuse démonstration. Et dans ce public clairsemé, quelques fans de la première heure mais surtout beaucoup de jeunes, des spectateurs n'étant même pas nés lors de la parution des deux premiers opus du chanteur. Sa contribution à l'album Upon the Bridge des géniaux Groundation en 2006 n'y est sans doute pas pour rien.

Accompagné de son Revolutionary Dream Band (constitué de deux joueurs de claviers, un guitariste, un bassiste et un batteur), c'est en toute simplicité que Pablo Moses entre sur scène. Il est agréable de constater que ce rastafari de 62 ans est toujours aussi vert que les plantes qu'il affectionne et que sa voix, en live, n'a rien perdu de sa superbe. Profonde, chaleureuse, gorgée de soleil, elle envoûte et apaise. Dès les premières mesures, le public se met à sautiller sur les rythmes caractéristiques de cette musique insulaire. Et compense l'absence de spectateurs en manifestant bruyamment son plaisir.

La set-list pioche allégrement dans le dernier album ( « Born to Be Bad », « Mama Yeah », « Guns », …) mais exhume également des perles du passé. Il est juste dommage de constater que le son du groupe qui accompagne Pablo Moses ne soit pas très Roots et privilégie les sonorités synthétiques avec des sons de claviers quelques fois malencontreux et désuets. Dommage pour celui qui souhaitait retrouver la chaleur des cuivres du dernier album. C'est dans les passages Dub (quand les instrumentations ne s'articulent qu'autour du squelette des chansons, le couple basse-batterie) que le concert atteint des sommets. Sans être exceptionnel, le concert (qui durera près de deux heures) reste néanmoins très agréable. Cela en raison de la personnalité même de l'artiste. Rebelle dans l'âme et influencé par le Rastafarisme (mouvement religieux tirant son nom de Ras Tafari, titre porté par l'empereur Ethiopien Hailé Sélassié) et les grands penseurs de la conscience noire Marcus Garvey, Steven Biko, Martin Luther King, le chanteur prône le plus sincèrement et honnêtement possible, sans démagogie aucune, un message de paix et d'espoir.

Des mots qui en cette période de troubles qui est la nôtre nous touchent en plein coeur.

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