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Bruce Brubaker Plays Philip Glass + Chamberlain au Grand Mix

C'est Chamberlain qui ouvre la soirée de sa musique ample, onirique et puissante dans un Grand Mix complètement reconfiguré, une salle toujours propice aux nouvelles expériences : nous sommes assis. La musique est extrêmement composée, élaborée, savante mais vivante et vibrante. C'est toujours un plaisir salutaire et sain que de se faire embarquer loin de ses formats habituels, hors de la fameuse zone de confort, celle qui nous chloroforme parfois, d'explorer avec eux toutes ces nouvelles contrées permises par la technologie,  repenser toutes les manières de faire de la musique. On entend une très solide culture musicale, un sens aigu du temps, de la progression et de très belles pulsations. On pense au travail de Son Lux ou de Sébastien Schuller. Ils se posent des questions communes : Comment articuler le vivant et l'organique au cœur des machines ? une belle scénographie tout en contours lumineux vient rehausser l’éclat de la musique. IEM (Intelligent electronic music) ? Oui, pourquoi pas, mais leur musique a plus de saveur que l'étiquette.

Bruce Brubaker vient défendre la dynamique très particulière de la musique de Philip Glass sur un magnifique Steinway. C'est d'une grande sobriété, on s'efface totalement derrière le propos servi. Brubaker joue à merveille de l'ampleur et des répétitions de la musique du compositeur. Il dessine ses arabesques presque scientifiquement et marie des tessitures très différentes, tout en toucher cristallin à droite, en lames de givre pur.  Plus de profondeur à gauche, un grondement totalement tonitruant parfois, relançant la dynamique. Beaucoup d'espace,  de retenue, de silences. Brubaker a un sens aigu de la suspension et de l'attente. Il cherche et trouve de l'espace, il cherche et trouve du temps, il laisse la musique respirer.

Il a l'élégance de se présenter en français et évoque Mad Rush, une longue pièce de quinze minutes, pose la question du sens en musique, évoque la pertinence de la question même. On pense, comme d'autres avant nous, à Nils Frahm mais aussi au sous-estimé Mal Waldron, pianiste de jazz longtemps habitant de Bruxelles de son sens du temps et de la suspension. On pourrait réécouter avec un intérêt majeur Songs of love and regret en duo avec Marion Brown, un album très marquant. Dans le Grand Mix, le silence est impeccable et impressionnant, le paquet de chips se fait léger et le gobelet ne claque pas au sol.

On convoque aussi Allen Ginsbergh, forcément, pour Wichita Sutra Vortex. On a le sentiment, tant c'est pur et intense, de retrouver l'émotion intacte de la musique d'avant les enregistrements, quand la musique n'existait que jouée. Il faut ici insister pour trouver la mélodie, le motif différentiel dans l'apparente inertie de la répétition, c'est très audacieux sur le plan formel, il faut trouver des appuis et de la percussion. C'est fait, brillamment. 

Dernière pièce, avant plusieurs rappels, Brubaker garde longuement les mains au dessus du clavier, dans une ultime suspension. Tout était dit. Entre la musique jouée et la suspension du temps, nous étions bien au Grand Mix avec Philip Glass. 

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