Suuns & Radwan Ghazi Moumneh + Son Lux + Lucrecia Dalt au Grand Mix

La première soirée dans le cadre du Festival Ground Zero s’annonçait plutôt belle. Son Lux et Suuns sur un même plateau, que demander de plus ?

Le tout accompagné et saupoudré par Lucrecia Dalt et ses nappes soniques. Face à un public clairsemé, la Colombienne devenue allemande nous fait découvrir son univers diaclasa. Oui, vous non plus vous ne voyez pas ce que cache ce mot obscur ? Le terme diaclasa fait référence à un type de fissure de roche. Avec cet éclairage, on saisit un peu mieux a posteriori le projet de Lucrecia Dalt. On restera pourtant de marbre face à ces ambiances glaciales, construites puis déconstruites par boucle tout au long des morceaux qui paraissent longs. L’expérience n’est pas à jeter, mais il faut s’accrocher pour en sentir le côté appréciable.

Dès l’arrivée de Son Lux sur scène, la foule se masse dans la salle. Dès les premiers morceaux, on est transporté par les sonorités aériennes et envolées des morceaux, par l’atmosphère équilibriste créée par le groupe. Les sons, les notes, les chauds-froids, les tensions, les différentes atmosphères : le groupe joue l’équilibriste - à trois - et on y croit. Surtout avec Ryan Lott (chant, clavier, PC) sous les yeux, artiste totalement habité par ses textes. Ses mouvements corporels sont quasiment épileptiques, frénétiques.

Avec Easy, on sautille, on trépigne, on lancine. Le Grand Mix s’agite, à l’instar d’un Rafiq Bhatia (guitare) monté sur ressorts qui n’a rien à envier à Tigrou. Comme embarquée sur un tapis volant, la salle tourbillonne dans des digressions phoniques, se fait secouer par la batterie parfois fracassante de Ian Chang, pour ensuite se faire poser tout en douceur par un simple petit « easy » soufflé à demi-mot par Ryan.
« C’est la deuxième fois que nous jouons ici, la première c’était en janvier, merci d’être revenus nous voir » lâche le frontman. Le plaisir à se retrouver est partagé entre Son Lux et le public. Celui-ci ne se fait d’ailleurs pas prier pour applaudir chaleureusement le groupe, qui s’amuse encore avec lui en fin de set avant de le remercier à nouveau d’être là. S’ensuit une ovation réciproque de part et d’autre de la scène. Elle était bien méritée.

Changement d’ambiance avec la troisième partie, ou plutôt : retour côté expérience. Les canadiens de Suuns sont déjà passés au Grand Mix en 2013, mais cette fois ils reviennent avec un autre projet, celui du musicien libanais Radwan Ghazi Moumneh, pour l’occasion renommé "Jerusalem In My Heart" (JIMH). En confidence, on nous a dit que ce side-project de Suuns était assez perché ; on ne va pas être déçu.

C’est plus à une répétition bourrée d’expérimentations qu’on assiste qu’à un vrai concert face à un public. Dès le début, JIMH prend les commandes pour étirer les intros des morceaux de Suuns avant que le groupe ne déboule avec ses murs de sons, mais sans l’option chant. On est assez décontenancé : il manque la cerise sur le gâteau. Alors on regarde la suite. Mais on restera sur notre faim : petit à petit, les Suuns s’effacent et JIMH reprend le flambeau. La salle, elle, est contrainte à l’attentisme plutôt qu’à l’activisme dans ce show. Pourtant, le public semble apprécier franchement cette mouture. Alors on ne va pas faire les vieux aigris…
Il faut pourtant constater qu’au fur et à mesure du set, le Grand Mix se vide. On pourrait rétorquer que la nuit qui avance et le concert en pleine semaine font rapatrier les résidents lillois, mais de mémoire, on a plus d’une fois vu ces métropolitains faire de la résistance lorsqu’ils sont emportés par un live.

La foule encore présente applaudit, danse même pour les plus transcendés d’entre elle. On ne parlera pas d’ovation comme pour Son Lux, mais c’est chaleureux. Il doit y avoir un secret pour apprécier à leur juste valeur ces boucles qui tournent jusqu’à la limite de l’usure et de l’agacement.
En voyant Ben Shemie (guitare, non-chant) faire face à son batteur devant une cymbale, on espère atteindre un point d’orgue. Mais même à cet instant, la magie peine à opérer. On est là et on doit écouter le(s) maître(s), comme à l’école. C’est peut-être nous qui n’étions pas assez ouverts pour ce genre d’expérience, ou alors le commandant de bord n’était pas clairement identifié. Disons qu’on n’est pas fait pour les répèt’ d’expérimentations. Nostra culpa.

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