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« Love me tender » : Anna Cazenave Cambet adapte le récit bouleversant de Constance Debré

« Love me tender » : Anna Cazenave Cambet adapte le récit bouleversant de Constance Debré

Anna Cazenave Cambet Love Me Tender Style : cinéma Date de l’événement : 10/12/2025

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Pour son actu ciné, LillelaNuit fait le choix du très beau Love me tender. Cette adaptation du livre de Constance Debré, portée par Vicky Krieps (Phantom Thread de Paul Thomas Anderson) est le second long-métrage d'Anna Cazenave Cambet, après De l'or pour les Chiens. Dans Love Me Tender, la cinéaste fait le portrait bouleversant de Clémence, jeune femme dont l'ex-mari découvre l'homosexualité, et lui refuse la garde de son fils. Rencontre avec Anna Cazenave Cambet par LillelaNuit.

Pourquoi avez-vous eu l'envie d'adapter le livre de Constance Debré, qui parle à la fois de choses très intimes, mais aussi de choses universelles à toute notre société ?

Anna Cazenave Cambet : C'est un livre que j'ai lu dès sa sortie. J'étais maman depuis peu, et je pense que je me posais tout un tas de questions liées à cette nouvelle identité. Quand je l'ai lu, j'ai eu l'impression que c'était un livre qui posait des mots sur des questions qu'on se pose toutes et tous quand on devient parent, mais qu'on ne s'autorise pas à se poser. Le livre soulève cette question de l'amour pour toujours, quand on devient parent pour la première fois, de ce qui nous tombe dessus, même si c'est joyeux, de ce lien qui devrait être indéfectible quoi qu'il nous en coûte. Je me souviens que j'avais trouvé ça assez libératoire de lire une personne qui osait questionner ce lien. Elle vient aussi parler d'un droit d'être artiste et mère, et de comment on trouve de l'espace pour ça. Moi, à ce moment-là, j'avais du mal à écrire, puisque j'étais avec un tout petit, et que trouver de l'espace pour écrire, c'était compliqué. C'est un livre qui m'avait beaucoup remuée à sa sortie, et puis après, pendant deux ans, je n’y ai plus pensé. Ce sont mes producteurs qui m'en ont proposé l'adaptation. Et j'étais assez convaincue dès le début que, dans ce film, il y a plusieurs portes d'entrée : on peut s'identifier à plusieurs des personnages, plusieurs parcours. Mais en le présentant au public, je m'aperçois qu'il y a des enfants qui revivent des choses liées au divorce de leurs parents. Il y a des pères qui viennent me voir pour me dire qu’ils se sont identifiés au parcours de mon personnage féminin, parce qu'ils ont vécu des divorces plus ou moins complexes. Il y a des femmes qui se posent des questions sur comment réécrire leur vie passée 40 ans, car il s'agit d'une femme qui va payer le prix le plus cher, parce qu'elle ose, elle se permet de penser à comment elle voudrait réécrire sa vie, quelle deuxième partie de vie elle voudrait avoir. C’est en ça que je savais que c'était très universel comme sujet. Que fait-on de sa vie dans un deuxième temps ? Comment s'autorise-t-on à changer de chemin, de route ? On est beaucoup à se poser cette question à un moment ou à un autre de nos vies.

Le film aborde un sujet universel : que fait-on de sa vie dans un deuxième temps ? Comment s'autorise-t-on à changer de chemin, de route ?

Anna Cazenave Cambet

Il est indiqué au générique que le film est librement inspiré du livre. De quelle manière vous en êtes-vous éloigné et comment vous trouvez votre mise en scène pour nous raconter cette histoire différemment, puisque le cinéma, c'est votre matériau ?

Anna Cazenave Cambet : Quand j'ai lu le livre, j'étais en train d'écrire autre chose, donc je n'étais pas à la recherche d'un livre à adapter. J’ai toujours pensé que je passerais par l'adaptation, mais je me sentais trop jeune pour le faire. Quand Raphaëlle Delauche et Nicolas Sanfaute, mes producteurs, sont venus vers moi et m'ont proposé l'adaptation, ça m'a paru évident. Beaucoup de maisons avaient envie de produire ce film et d'adapter ce livre. Je n'ai pas eu trop de doutes sur le fait que c'était adaptable. Je ne me suis pas dit que ça allait être particulièrement difficile, et pourtant, c'est un livre qui est écrit à la première personne. Dans le livre, Constance Debré énumère plus qu'elle ne décrit les personnes qu'elle rencontre ; on la suit de très près, de façon très intime, en ayant très peu accès à tout ce qui est autour d'elle. Mais j'avais l'impression que la structure du roman, qui se base sur le temps très long de la justice, de tout ce qu’elle traverse avec son enfant, donnait une ossature assez claire très tôt. Je me suis dit : je vais respecter ça à la lettre, parce que c'est la vraie histoire de l'autrice, et que j'avais envie de témoigner de cette lenteur. Puis aussi raconter que cet enfant, sa temporalité, n'est pas la même, et que dans sa vie de 3, 4 mois, tout change, il a grandi, et que quand on perd du temps avec nos enfants, c'est un temps qu'on perd pour toujours. J'étais intéressée par le lien entre l'enfant, la mère et le père de l'autrice. Je voulais garder ces échappées vers la campagne. Là où, par exemple, je me décale par rapport au livre, c'est que je les amène dans les Landes, qui est mon territoire de cinéma, car je viens moi-même des Landes, alors que dans le livre, c'est sur les bords de Loire. Ça n'avait pas beaucoup d'incidence sur l'histoire, donc j'en ai profité pour amener tout le monde par chez moi. Après, dans les personnes qu'elle rencontre autour d'elle, il y a des personnages qui sont vraiment très hybrides entre ce que j'ai écrit, et les personnages du roman, notamment parce qu’elle fait beaucoup de rencontres romantiques dans le livre, et elle en fait beaucoup moins dans le film. Ce qui est marrant, c'est qu'aujourd'hui, c'est difficile pour moi de dire ce qui appartient à mon film et ce qui appartient au livre. C'est venu se mélanger.

La présence de Vicky Krieps, votre actrice, vous permet-elle de dézoomer du livre ?

Je crois que le dézoom, s'est fait bien avant. Il s'est vraiment fait à l'écriture. Par ailleurs, je savais que je ne faisais pas un biopic sur Constance Debré, je n'ai jamais cherché à le faire. Je connais maintenant très bien Constance et je n'ai jamais cherché à la représenter dans le film. Il y a tout un tas de choses que je change : je change son prénom, ses tatouages, tout un tas de petits indices sur sa vie. J'en fais un personnage de cinéma et un personnage qui est fictionnalisé. Ce à quoi je me tiens, c'est le parcours judiciaire. D'ailleurs, je n'ai pas cherché à ce que ma comédienne rencontre Constance. Ça s'est fait à la toute fin du film et je ne voulais pas qu'elles se rencontrent avant, parce que je ne cherchais pas du tout un mimétisme, une ressemblance. Bien sûr, il y a des codes qui sont liés à la communauté queer, il y a tout un tas de signifiants, ne serait-ce que dans le vestiaire de ma comédienne, qui viennent rappeler des choses qui sont déjà dans le livre. Ce que Vicky amène sur le tournage, c'est ce qu'on va faire ensemble comme travail sur les nuances. C'est une actrice brillante, capable d'aller très loin dans la précision des émotions qu'on recherche. Notre travail ensemble a consisté à faire très attention à ce que les émotions soient souvent plus à fleur que réellement exprimées. C'est un personnage qui tient tout un tas de choses tout le film, donc on a pu venir, elle et moi, chercher comment on allait mettre de la nuance dans toutes ces façons de réagir.

Anna Cazenave Cambet. Photo : Grégory Marouzé

 

On a travaillé toutes les scènes autour de la question du consentement. C'était très important pour moi.

Anna Cazenave Cambet

Vous ne tombez pas dans des travers trop vus d'une représentation de l'homosexualité féminine au cinéma, et notamment dans la représentation de l'amour physique. D'une certaine façon, en tant que spectateur, on a l'impression de participer à ces scènes, mais sans être voyeur. Leur hors-champ ou la pénombre, ont une grande importance. Ce qui revient un peu à la même chose. Comment vous avez trouvé la grammaire pour filmer des scènes d'amour ?

Anna Cazenave Cambet : Je suis très contente de ce que vous dites, parce que ça a été effectivement au centre de la réflexion sur ce film, puisqu'il y a plusieurs séquences d'intimité. On les a abordées de différentes façons, ce n'est pas le premier film sur lequel je travaille sur ces questions. Les questions d'identité, les questions de communauté, et puis la question de l'intimité au cinéma, c'est quelque chose qui a toujours été au centre de mon travail. Donc on s'arme aussi, petit à petit, et on développe un regard et une politique à l'endroit de ces scènes. Je fais partie d'une génération de femmes réalisatrices qui ont lutté pour que des coachs d'intimité soient présents sur les plateaux, ce qui est une liberté et pas un empêchement, contrairement à ce que beaucoup de mes collaborateurs hommes d'un certain âge peuvent dire. Ce sont des personnes qui viennent nous accompagner pour s'assurer que tout le monde sera sécure sur le plateau : les comédiens, comédiennes, mais aussi l'équipe et moi. On fait en sorte que tout le monde soit OK avec ce qui va se passer, parce que, souvent, on oublie que, quand on est metteur en scène et qu'on met en scène des séquences d'intimité, évidemment les acteurs ne font pas l'amour pour de vrai, mais il n'empêche que les gens sont nus, il n'empêche qu'on leur demande de se toucher pour de vrai, il n'empêche qu'on est 50 autour d'eux. J'appartiens à la communauté queer et je pense que je ne fantasme pas les séquences d'intimité. Ce n'est pas quelque chose qui naît de mon désir de produire ces images, mais plutôt d'une envie de témoigner à l'endroit de l'amour et de l'intimité entre femmes, de ce qui existe, de ce qui est vrai. Ça m'intéresse que mon personnage puisse avoir des rapports sexuels avec des femmes avec qui il n'y a pas de lendemain, et avec qui il n'a jamais été question qu'il y ait un lendemain. On a beaucoup montré le cruising du côté homosexuel masculin, mais on l'a très peu montré du côté des lesbiennes. Ça m'intéressait de pouvoir dire que Clémence, mon personnage, passe par des relations physiques qui sont le seul truc qui lui reste à un moment de sa vie pour se reconnecter à elle-même. Pour elle, c'est une façon de traverser son histoire et de se rendre concrète. Il y a autre chose qui fait que, peut-être, vous ne vous sentez pas voyeur, et si c'est le cas, j'en suis ravie, c'est qu'on a travaillé toutes les scènes autour de la question du consentement. Si on les décortique, notamment une séquence centrale du film, qui est une séquence où on allie à la fois une intimité et une sexualité concrète et assez frontale, les deux personnes se répètent leur consentement, y compris dans un acte qui est purement érotique. Ça, c'était très important pour moi pour travailler sur ce sujet, qui est un des sujets du film.

Antoine Reinhardt, qui incarne Laurent, l'ex-mari, a un rôle très complexe, pas facile du tout. Comment avez-vous travaillé pour que cet antagoniste fort, puisse garder son humanité ?

Anna Cazenave Cambet : Antoine Reinartz, est quelqu'un qui, quand il arrive sur un plateau, est surpréparé. C'est quelqu'un qui travaille énormément en amont, quelqu'un de très, très exigeant sur le rapport au travail, de lui à lui-même. Quand il est arrivé sur le plateau, ça a été impressionnant pour moi, parce que j'ai compris dès la première journée qu’il avait beaucoup de choses à me proposer. Il habite son personnage; dès notre première rencontre, il a défendu son personnage. Il a travaillé tout le long du tournage, au point que, parfois, je me mettais à douter de ce qu'il me racontait, parce que je n’arrivais plus à comprendre où il se situait, lui, réellement, par rapport à l'histoire. Mais lui savait, et ça m'a aidée à trouver l'humanité de ce personnage, parce qu’on ne peut pas défendre un personnage et le jouer si on ne l'aime pas. Antoine ,a su trouver des portes d'entrée. Il me disait : « Bah oui, mais elle amène son enfant chez un mec qui est sous Subutex. » Je l'avais écrit, donc j'étais au courant, mais en même temps, d'un coup, il me le mettait sous les yeux comme étant potentiellement quelque chose d'étrange, et il travaillait à me ramener toujours à ça. Il défendait son rôle comme un avocat, et c'était assez impressionnant à voir. Et c'est de là qu'on est partis, parce qu'il s'est autorisé à l'aimer, ce que moi je faisais moins, mais il m'a permis de me connecter à lui pour le diriger justement parce qu'il s'est autorisé à le comprendre. Aujourd'hui, on est très au clair sur qui est ce personnage, et Antoine n'est pas un homme toxique, justement.

Ce qui est au cœur du film, c'est le rapport à la possession des hommes sur les femmes.

Anna Cazenave Cambe

L'un des thèmes au cœur du  film est-il la masculinité toxique ?

Anna Cazenave Cambet : Ce qui est au cœur du film, c'est le rapport à la possession des hommes sur les femmes, et le fait que cet ex-mari, ce qui lui arrive, c'est qu'il vit une perte d'identité. Il estime que s'il perd son ex-compagne, il perd un morceau de lui et qu'il a tous les droits de sur ce morceau de lui qui est son ex-femme. On appelle ça “masculinité toxique” aujourd'hui ; je pense que c'est une partie du problème, mais c'est aussi la société hétéronormée dans laquelle on vit, le patriarcat qui joue. Ce qui se passe au tout début du film, c'est qu'il comprend qu'il ne l'aura plus jamais. Alors il va tout bousiller : elle n'a plus le droit d'avoir accès à ce qui est pourtant au centre de leur relation. Ce qui était important pour moi, c'était de pouvoir faire comprendre que cette personne souffre ostensiblement, c'est-à-dire que ce qui lui arrive, qui est une vexation, se transforme en une immense souffrance. En tout cas, moi, en tant que femme, il n'y a que comme ça que je peux me l'expliquer. C'est l'idée que cet homme souffre, mais le moyen par lequel il passe, pour témoigner de sa souffrance, c'est de l'ultraviolence. Et ça, pour moi, c'est inexcusable.

Qui est ce petit garçon, incroyable de maturité, de sensibilité, d'intelligence, qui semble, parfois plus adulte que les adultes ? Et dirige-t-on un enfant de la même façon qu'on dirige un acteur adulte ?

Anna Cazenave Cambet : Viggo Ferreira-Redier est un acteur né. Il a fait de petits rôles dans d'autres films. Quand on le reçoit en casting, très tôt, on se rend compte qu'il est quand même très solide et qu'il a très envie. Puis, dès le casting, je comprends son intelligence. C'est un enfant avec qui on a envie de passer du temps. Il est un peu plus vieux qu'il n’en a l’air, ça aussi, c’est une aide, parce que quand je le rencontre, il fait vraiment tout petit. Mais en fait, il était déjà au début de son collège, donc il est ailleurs au niveau de ses émotions, de son expérience de vie, et il a envie. On l'a entouré d'une coach pour enfants qui avait pour rôle de rester avec lui tout le temps, d'être la personne référente pour lui et de pallier les difficultés éventuelles. Pendant des années, on a laissé les enfants errer sur nos plateaux, entourés d'adultes, sans aucun système de sécurité autour d'eux. En l'occurrence, Viggo n'était jamais seul. Sa coach, Violette, a un autre rôle : celui de ménager l’espace-temps autour de Viggo. de lui dire : “là, tu peux te reposer” ou “viens, on va jouer”. Elle aide à ce temps de concentration, puisque, sur un tournage, c’est difficile pour tout le monde : les acteurs, les adultes, y compris les metteurs en scène. Il y a des moments on-off tout le temps, il faut savoir économiser quand on doit économiser. Puis ensuite, elle a développé toute une palette d'outils qui nous permettait de communiquer tous les trois : à partir d’images, à partir de frises. Ça vient déplacer l’enjeu autour de la scène. On ne va jamais passer par une explication psychologique de ce qui est en train de se passer. Par exemple, je n'ai jamais parlé avec Viggo de la douleur, de ce qu'il éprouve, du fait qu’il n’a pas vu sa mère depuis tant de temps. On passait plutôt par : « Écoute, là, la scène, on vient de la faire. Tu es à tel niveau de colère. Eh bien nous, ce qu'on cherche, c'est d'être à ce niveau-là de la colère. Comment peut-on faire pour aller jusque-là ? » On faisait comme ça, en appelant à des choses qui lui donnaient des outils, sans que ça passe par un truc psychologisant du type : “Ah oui, souviens-toi d'un truc qui t’a fait mal pour que tu sois triste.”

Un extrait de film nous a été refusé pour des raisons politiques. Quand ils ont compris de quoi parlait Love me tender, les droits nous ont été retirés.

Anna Cazenave Cambet

On voit deux extraits de films dans Love Me Tender : L'homme qui rétrécit de Jack Arnold, qui est magnifique, et Cris et Chuchotements, le chef-d'œuvre d'Ingmar Bergman. Pourquoi cette présence de ces deux films ? Ce sont deux formes de cinéma qui peuvent sembler opposées mais qui, d'une certaine façon, se rejoignent.

Anna Cazenave Cambet : Cris et Chuchotements, c'est clairement un film de chevet pour moi. Ce qui peut paraître un peu étonnant parce que c'est quand même assez sinistre, mais ça a été une splendeur pour moi de le découvrir quand j'étais très jeune, et je pense que je ne suis toujours pas remise de ce mur rouge. C'est un film qui compte beaucoup pour moi : le rapport au jeu des comédiennes, ce huis clos, toutes ces femmes, ce travail sur une terreur sourde. Je trouve que c'est un film magistral et j'y reviens souvent. Beaucoup de films de Bergman comptent pour moi, mais celui-ci en particulier. Donc j'avais envie de le mettre, et la séquence que je mets dans le film est très trouble. Elle est entre deux sœurs, mais si on ne le sait pas, on ne comprend pas quel est le lien entre ces femmes. Il y a quelque chose sur le fait de s'attirer, de se repousser, sur la douleur d'être au contact de l'autre, le fait de refuser l'amour et la tendresse de l'autre. Ça faisait sens pour moi, parce que c'est un moment du film où il y a un enjeu pour mon personnage d’accepter ou non de laisser entrer de l’amour. Et puis ce sont les chignons chez Bergman qui font que Monia Chokri porte un chignon dans mon film, donc tout est un peu lié. Pour ce qui est de L’Homme qui rétrécit, au départ il y avait un autre extrait qui avait été choisi pour cette séquence. Mais cet extrait nous a été refusé pour des raisons politiques : au début, on nous avait plus ou moins donné les droits, mais quand ils ont compris de quoi parlait le film, on nous les a retirés. Donc, il a fallu trouver autre chose. On a essayé plein de choses, y compris d'autres extraits de films de très gros studios. Et puis un matin, j’arrive et mon monteur me montre cette séquence montée avec un extrait de L’Homme qui rétrécit, et il me dit : “J’ai pensé à ça dans la nuit. Qu’est-ce que tu en penses ?” C’était merveilleux : l’idée de cet homme qui n’en finit pas de rétrécir et qui devient tout petit face à ce très gros chat, je trouvais que c’était très à propos par rapport au film, et ça marchait parfaitement avec la séquence qu’on avait tournée. Je cherchais aussi à mettre un chat dans le film parce que je n’en avais pas mis, et ça me peinait. Tout était comme ça aligné. Je dirais que ça vient témoigner aussi du lien que j’ai avec mon monteur, qui est quelqu’un qui m’a ouverte à une cinéphilie beaucoup plus grand public à un moment où j’étais sur des films d’auteur très pointus. Joris Laquittant est arrivé dans ma vie avec une immense culture du cinéma de genre ; il écrit sur le cinéma de genre, il a une culture inépuisable du genre au sens large, et un amour pour les films des années 90, pour les films familiaux et pour des films beaucoup plus anciens. Ça fait dix ans qu’on travaille ensemble et que nos cinéphilies se mélangent. Aujourd’hui, je suis vraiment un hybride entre des films ultra grand public et des films beaucoup plus pointus, et c’est une chose à laquelle je tiens, parce que le cinéma est un des rares médiums qui nous permet de nous adresser à tout le monde. C’est important pour moi, quand j’écris, de me rappeler qu’avec cet outil-là, je peux parler à tout le monde. Je défends une culture très mixte. Mon premier rapport aux images, ça a été MTV et les clips avant les films, et c’est quelque chose qui existe encore dans mon travail et auquel je me réfère toujours.

Les infos sur Love Me Tender

Love Me Tender d'Anna Cazenave Cambet

Librement adapté de l’ouvrage de Constance Debré (Editions Flammarion, 2020)
Scénario : Anna Cazenave Cambet
Avec : Vicky Krieps, Antoine Reinartz, Monia Chokri, Viggo Ferreira-Redier

Sortie le 10 décembre 2025
Durée : 2h14

Synopsis : Une fin d’été, Clémence annonce à son ex-mari qu’elle a des histoires d’amour avec des femmes. Sa vie bascule lorsqu'il lui retire la garde de son fils. Clémence va devoir lutter pour rester mère, femme, libre.

Entretien réalisé par Grégory Marouzé le 2/12/2025 à Lille- Retranscription de l'entretien Lina Sergiani.
Remerciements Le Majestic Lille

Photos du film, affiche et film-annonce : © Tandem Films

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