Avec IAMWILL, le guitariste et compositeur Guillaume Vierset ouvre un nouveau chapitre de sa carrière déjà foisonnante. Habitué des explorations jazz (LG Jazz Collective, HARVEST Group, EDGES) et compagnon de route d’artistes indie-rock et pop comme Sharko, Typh Barrow, Sacha Toorop ou Halehan, il dévoile cette fois un projet résolument personnel : du folk indie délicat et introspectif, où chaque note semble pesée et chaque silence a sa place.
Le premier EP de l'artiste belge Guillaume Vierset
Son premier EP, 1999, attendu pour le 24 octobre, s’annonce comme un hommage à la fragilité et à l’impermanence. La guitare y est précise, ciselée, parfois surprenante ; la voix, elle, se fait tour à tour feutrée, fragile ou légèrement éraillée, accentuant ce mélange de mélancolie et de lumière. On y perçoit une nostalgie assumée, celle d’une époque révolue 1999, cette année charnière juste avant le grand « reset » de l’an 2000.
Après un premier single remarqué, Oceans Bloom (octobre 2024), IAMWILL confirme avec ce projet sa volonté d’aller à l’essentiel : des chansons dépouillées, sincères, nourries par une riche expérience de musicien. Les textes, confiés à David Bartholomé (alias Sharko), ajoutent encore une dimension poétique et singulière à cette folk intime, à la fois familière et nouvelle.
Et puis, il y a ce paradoxe fascinant. Quand on le rencontre, Guillaume Vierset est solaire, joyeux, lumineux. Mais dès qu’il saisit sa guitare, c’est comme s’il enfilait une cape invisible : il bascule dans un univers plus profond, plus intérieur, habité par une certaine gravité. Comme ces artistes qui rayonnent à l’extérieur mais cachent en eux une part d’ombre, IAMWILL révèle dans sa musique une face plus intime, presque mélancolique, qui contraste avec son énergie lumineuse. Ce décalage, un peu comme le sourire du clown qui dissimule la tristesse, donne à son projet toute sa densité et sa sincérité.
Chez LillelaNuit, on a eu un vrai coup de cœur pour ce projet. Comme souvent avec les artistes belges, il y a cette singularité : IAMWILL sonne à la fois belge dans sa sincérité brute, et anglo-saxon dans ses références et son élégance mélodique. Ce mélange unique lui confère une identité forte, immédiatement reconnaissable, et confirme qu’il faudra compter sur lui pour de jolis morceaux marquants dans l’avenir.
Un artiste aux multiples facettes, donc, qui choisit ici la voie de l’intimité et de la confession musicale. À la croisée des genres, IAMWILL se révèle dans un registre indie-folk très personnel, délicatement nostalgique et subtilement carillonnant. Une belle promesse pour ce premier EP… et une raison de plus d’aller à sa rencontre.
N’hésitez pas à le découvrir dans ce magnifique passage live sur matele.be.
Interview - « 1999 » : l’année où tout a commencé pour IAMWILL
LillelaNuit : Votre projet IAMWILL tranche avec vos explorations jazz et vos collaborations pop-rock. Pourquoi avoir choisi ce registre indie-folk, dépouillé et très personnel ?
IAMWILL : En fait, je pense plutôt que c’est une des vraies raisons pour lesquelles je fais de la musique, et que même si j’adore les explorations jazz et les collaborations pop rock, ma vraie nature, c’est la folk.
Mon premier concert, j’avais 13 ans, c’était dans un centre culturel, et c’était de la folk. Entre 13 et 16 ans, j’ai écrit de la musique folk avec ma guitare acoustique, j’étais un « songwriter ». C’est d’ailleurs en 1999 que je me suis promis de toujours écrire des chansons…
Puis il y a eu mes années au conservatoire, de nombreuses rencontres, je suis parti dans une autre direction avec beaucoup d’amour et d’ambition. Je pense que j’avais besoin d’acquérir de la maturité pour me lancer pour de vrai dans une « carrière » de singer-songwriter…
Mais cela a toujours été là, dans ma tête. C’est certainement mon premier amour… et j’y reviens.
On sent dans votre musique un double mouvement : quelque chose de très lumineux, solaire, mais aussi une part plus sombre, plus introspective. Est-ce un contraste conscient que vous cultivez, ou simplement votre façon naturelle de composer ?
Je suis quelqu’un de très nostalgique, et quand j’écris de la musique, je ne suis jamais satisfait tant que le morceau ne vient pas titiller quelque chose de très profond en moi, quelque chose qui me touche profondément, sans que je sache vraiment l’expliquer.
Je pense que j’ai conscience de ce contraste, et que c’est justement ça que je cherche. Par contre, je ne savais pas que ce contraste était visible, et ça remplit mon cœur de joie de savoir que j’arrive à faire passer cette dualité : entre quelque chose de solaire, de lumineux, et en même temps quelque chose de plus sombre.
Cette dualité me fait du bien. Parfois, je me dis que je cherche à retrouver ces premières sensations, celles des tout premiers morceaux que j’ai écrits quand j’avais 13 ans…
Cela répond en partie à la question du titre du premier EP, « 1999 », car en 1999, j’avais 13 ans…
Vos influences semblent multiples : jazz, folk, pop anglo-saxonne… Quels artistes, disques ou univers vous ont particulièrement marqué et nourrissent aujourd’hui IAMWILL ?
Mon premier amour, c’était les Beatles. J’ai dévoré leurs disques quand j’avais à peine 10 ans. Je suis à la recherche de sentiments, d’émotions singulières et authentiques. J’ai pu retrouver ça chez Fionn Regan, Bon Iver, Neil Young… Mais j’ai aussi retrouvé ce genre d’émotion dans une musique complètement à l’opposé de la folk : notamment le jazz, le rock ou la soul.
Le jazz est venu plus tard pour moi, et il m’a considérablement aidé à développer ma connaissance de l’harmonie, à comprendre certaines choses qui me touchaient musicalement. Le jazz a aussi affiné mon oreille à certaines progressions harmoniques qui n’existent pas dans la musique folk, mais qu’on retrouve dans d’autres musiques plus complexes…
Cet EP, 1999, de quoi parle-t-il au fond ? Et plus largement, quelle vision de la musique portez-vous à travers ce projet ?
1999 » parle d’une réconciliation entre le moi préadolescent et celui que je suis devenu aujourd’hui.
C’est aussi le passage des années 90 aux années 2000, la fin des mixtapes, des CD, des VHS… 1999, c’est déjà une année hyper vintage finalement. Ce n’est pas juste une date : c’est un souvenir fort, un hiver silencieux où quelque chose s’est éveillé.
Ce premier EP revisite ce basculement intime, entre une enfance qui s’efface et un futur encore flou. Des images refont surface : la neige, une luge, un insecte fantomatique. Et au milieu de tout cela, une certitude tranquille naît : celle d’écrire, peut-être juste pour ne pas oublier…
[1999,] c'est aussi le passage des années 90 aux années 2000, la fin des mixtapes, des CD, des VHS… 1999, c’est déjà une année hyper vintage finalement.
IAMWILL
Vous avez collaboré avec David Bartholomé (Sharko) pour les textes. Comment s’est déroulée cette rencontre artistique et qu’est-ce que son écriture apporte à votre univers ?
David est quelqu’un de très important pour moi. D’abord, ma place au sein de Sharko m’a permis, d’une certaine manière, de retrouver mes premiers amours musicaux, de me retrouver moi-même, de me poser les bonnes questions, de me recentrer. J’ai besoin de Sharko, de jouer cette musique, elle me fait vibrer.
Avec le temps, je me suis lié d’amitié avec David. C’est l’une des plus belles personnes que j’ai la chance de côtoyer. Il m’a fallu du temps pour le comprendre, mais j’ai pour lui beaucoup de respect et d’affection. Il est devenu bien plus qu’important dans ma vie. Il a aussi été l’élément déclencheur de IAMWILL.
Un jour, j’étais en train de préparer un quatrième album avec HARVEST Group, un groupe de jazz influencé par la folk (tiens tiens…). Et je me suis demandé : “Et si j’ajoutais des paroles là-dessus ? Qu’est-ce que ça donnerait ?” J’ai alors envoyé une dizaine de morceaux à David, juste pour essayer. Quelques semaines plus tard, j’ai rendez-vous chez lui, peut-être pour bosser sur Sharko, ou simplement pour se voir, et en arrivant, il sort sa guitare… et me chante mes dix titres avec des paroles.
Ça a été le déclic. Le vrai déclencheur de IAMWILL. Je devais continuer. Il m’a motivé, il m’a donné confiance.
David a cette force rare : celle de comprendre mes mélodies et de savoir faire sonner les mots. J’ai beaucoup de chance de travailler avec lui. D’une certaine manière, cela donne une double profondeur à ma musique. Ses paroles fortes me donnent encore plus envie d’écrire, de continuer, d’aller au bout.
J’ai besoin de Sharko, de jouer cette musique, elle me fait vibrer.
IAMWILL
Pour finir sur une note plus légère : avez-vous une anecdote musicale marquante ou insolite – sur scène, en studio, ou même en tant qu’auditeur – qui vous a profondément marqué ?
Pour mon disque The End Of The Fuck World avec mon groupe de jazz-rock EDGES, j’ai vécu un moment en studio plutôt incroyable…
C’était en plein COVID, et pour ce disque, je m’étais entouré du batteur américain Jim Black et du bassiste Anders Christensen (ex-The Raveonettes). J’avais réservé seulement deux jours de studio, ce qui est très peu pour enregistrer un album.
Le premier jour, le bassiste arrive avec deux heures de retard. Il n’avait pas dormi, il était ivre. En arrivant, il a demandé de la vodka… qu’il a descendue d’un trait. Résultat : impossible d’enregistrer quoi que ce soit ce jour-là. Je suis en panique.
Le lendemain, c’est notre dernier jour. Rien n’est encore dans la boîte. On commence à enregistrer à midi… Et à 14h30, le disque était plié. Terminé. C’était complètement dingue.