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Yakich et Poupatchée au Théâtre du Nord

Yakich et Pouparchée, au Théâtre du Nord
Comédie crue de Hanokh Lévin
Mise en scène de F. Garcia-Bélier

     La première chose que l’on peut dire sur ce spectacle, c’est qu’il porte bien son genre : « comédie crue ». Cette œuvre aborde sans tabou, sans euphémisation le thème de la sexualité entre deux nouveaux mariés, qui ont la particularité d’être tous les deux laids. Et donc l’homme, nourri de fantasmes de belles femmes, n’arrive pas à avoir une érection et à honorer sa femme ainsi que tout le monde l’attend de lui. Et donc il ne remplit pas son rôle : procréer, ce qui dérange tout le monde. En effet, ce problème ne reste pas dans la sphère privée mais les parents de deux familles vont s’en mêler pour comprendre la raison pour laquelle Yakich ne peut coucher avec sa femme. Voilà le début d’un long périple pour ses six personnages, qui va les amener dans des lieux insolites : celui des prostituées, puis un pays proche d’un monde imaginaire.

     Ce qui surprend dans ce spectacle, c’est l’audace de la langue employée par l’auteur. Devant une Poupatchée ridiculement laide, aucun personnage ne cache ce qu’il pense, ce qui est souvent source de comique, mais tend parfois à la lassitude du public face à cette cascade d’insultes parfois gratuites contre cette jeune femme que personne ne prend en pitié. De fait, les rapports humains sont d’une extrême froideur dans cette œuvre, personne ne semble s’aimer, les parents – symbole du monde adulte – ont accepté de passer leur vie sans rien en attendre, coincés dans leur petit monde répétitif. Toute leur action sera de faire en sorte que Yakich perde un à un tous ses espoirs et qu’il entre dans leur monde, qu’il perde ses illusions de jeune homme. Cette œuvre interroge aussi plus largement le concept de la Beauté. Comment s’aimer sans le passage par l’acte sexuel ? L’homme peut-il accéder à cette beauté, ou n’est-il condamné qu’à errer dans un monde de laideur (débarrassé de la beauté divine) ?

     Passée cette interprétation que l’on peut proposer de cette œuvre originale, il reste que cette œuvre est avant tout un spectacle bien vivant, au rythme étourdissant et mis en scène avec intelligence. Aucun temps mort dans ce moment de théâtre, on rit, on s’interroge, puis le rire revient. Mais quel rire ? Pas celui des comédies de Molière, pas de comique farcesque, mais un comique qui prend sa source dans le cynisme de voir sans embellissement les rapports humains montrés à la vue de tous. Ce spectacle est aussi éclatant au niveau des couleurs (le rouge domine largement dans la mise en scène, symbole évident du désir, de la violence des rapports humains exhibés au public) – les décors amovibles et roulants contribuent à donner à cette œuvre une vitesse qui traduit bien cette course contre la montre vécue par Yakich, il ne doit pas perdre de temps, il lui faut au plus vite trouver une solution !

     Un spectacle déroutant mais fascinanttoutefois, ne venez pas avec vos enfants dans le but de les initier au théâtre, vous auriez à répondre à trop de questions en sortant du théâtre….


Au Théâtre du Nord du 25 au 30 mars

 

 

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