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Nadia Reid : « Listen to Formation, look for the signs »

Nadia Reid : « Listen to Formation, look for the signs »

Nadia Reid Listen to formation, look for the signs Style : Folk et long nuage blanc Sortie : 27/11/2015

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On n'a pas entendu pareil miracle depuis des albums aussi tétanisants, en leur temps, que le premier Tracy Chapman, le premier Suzanne Vega. Pas pour le son... pour le choc. Des objets musicaux non identifiés qui avaient arrêté le temps pour un moment. Peu importe la manière dont se sont déclinées, répétées, enlisées, relancées l'oeuvre des deux compositrices. On parle ici de frisson, d'émotion brute totalement dénuée de toute parcelle intellectualisée ou cérébralisée, d'un ressenti pur, d'une musique qui vient vibrer et creuser un sillon profond au milieu de notre moelle épinière, une voix qui touche et qui porte. Un folk étincelant et d'une limpidité absolument inouï, d'un dépouillement choisi et choyé, comme si la moindre poussière allait tout faire s'écrouler, comme si l'équilibre était tellement ténu qu'il ne supporterait rien en plus, rien en moins. Ne jouant d'aucune facilité, Nadia Reid impose une tonalité unique. La pochette vaut refus catégorique, autant que déclaration : pas de Photoshop et pas de faux-semblant et pas de couleurs et pas de profil avantageux et pas de lunettes tendances. Telle quelle, telle qu'elle. C'est l'album qu'on écoute. Et on l'écoute, stoppé net.

Guitares rampantes en gonflement progressifs, essentiellement acoustiques, contrebasses subtiles, arpèges réverbérés dans l'écho, prises d'appui sur les tambours, tensions et reprises totalement contrôlées par une voix qui semble maîtriser son propos comme jamais sur un premier disque. C'est tout sauf un folk propret pour feux de camps universitaires, il est nourri de tempos crépusculaires en suspension lente en eaux profondes, d'une voix qui surnage en surface bleutée et claire, capable de mettre en valeur la phrase clé d'une simple inflexion He was the sailor of my ship dans Ruby... On songe aussi aux paysages qu'on avait pu apercevoir dans la série de Jane Campion Top of the lake, ceux de la Nouvelle Zélande, le pays du long nuage blanc, un regard que rien ne semble arrêter, espacé, spacieux, comme la production du disque.

Si un disque vaut surtout par son équilibre et son expressivité, on est servi royalement. On mesure aussi une humanité, une profondeur, une densité inouïe. Poser ça, cash, sur la table, à 24 ans, en refusant le moindre effet de manches un peu gratuit, c'est extrêmement impressionnant, porteur, enivrant à sa façon. 

On avait frémi lorsque son Bandcamp avait annoncé qu'elle donnerait un concert à Lille. Ce sera à La Péniche, le 27 mai. Il pourrait bien se passer un truc de Grand...

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